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-   -   Bien des années après (Batman). (http://www.buzzcomics.net/showthread.php?t=40917)

yno 30/05/2011 09h44

Bien des années après (Batman).
 
Voici une courte nouvelle/fanfic écrite il y a quelques mois et mettant en scène "Batman".
Comme j'aime bien gribouiller en parallèle de l'écriture, j'ai réalisé un visuel, sorte de couverture, pour cette histoire que voici :

http://img54.xooimage.com/files/7/e/..._o-26e54a6.jpg

Bien des années après



Je m’extraie du véhicule en gémissant. Murmure plaintif aussi bref que vain d’un animal sur le point de trépasser. Le sol est gris, dur, glacé et piquant. Dans mon état, je ne sens même plus ses éraflures qui m’arrachent les avant-bras. Je ne sais pas si c’est moi ou l’humidité naturelle des souterrains mais la température est particulièrement mordante. Mes jambes en tremblent. Ou bien est-ce la fatigue ? La tête reste froide mais mon corps ne l’est pas moins.

Je m’aide de mes coudes usés pour avancer dans l’enchevêtrement de couloirs naturellement creusés dans la roche de la grotte. Je souffre mais la douleur n’est pas importante. Elle fait se rappeler à moi d’anciens souvenirs de militaire, les tranchées d’une guerre à l’étranger et le dépassement de soi au nom d’un objectif primordial. J’esquisse un sourire pour moi-même en appréciant l’ironie de la situation.

La progression est difficile. Je sens ma salive qui dégouline le long de mon menton mais je n’ai plus la force de l’essuyer. Pas tout de suite du moins. Je dois parer au plus urgent, vérifier le vital. Je me laisserais aller à la coquetterie ceci fait. Si je parviens jusque là.

Je me hisse avec toutes les peines du monde au niveau de la console de commande. Les images défilent sur les multiples écrans, chacun renseignant sur les humeurs de la ville, du pays et du monde. De mes doigts sales aux ongles cassés, j’entre le mot de passe et les codes préparés bien des années plus tôt. L’essentiel validé, je passe à la seconde étape du protocole défini depuis que j’ai décidé de revêtir ce costume. Je dois sauver les apparences. Mon souffle devient de plus en plus chaotique. Je connais les symptômes. Thrombose. Mes poumons sont touchés. Caillots de sang. Le liquide va s’y répandre son peu. Embolie. Je vais étouffer.

Je m’active. Mes gestes doivent être précis et mesurés pour ne pas m’épuiser d’avantage. Je dois rationner mes dernières forces. Je décliquète la lourde ceinture à ma taille. L’équipement qu’elle contient tombe comme une masse sur le parterre de crépi. Malgré mes phalanges brisées, je parviens à retirer mes gants trempés par ma transpiration déjà refroidie. Mes doigts sont blancs, tordus, bleus, crispés, violacés. Ma peau est vieille, tachetée, râpée. Si la violence ne m’avait pas rattrapée cette nuit, c’est l’âge qui l’aurait fait sous peu. Il y a pire manière de mourir qu’en essayant d’aider les honnêtes gens de cette ville. En levant le bras pour retirer le masque, je pousse un cri de fillette. Heureux que personne ne m’ait entendu. J’ai une fracture ouverte de l’humérus. Ca arrive à mon âge mais sûrement pas dans ces conditions. L’os est saillant et le fluide vital s’est amalgamé autour pour former une croute molle. Le masque arraché à mon visage meurtri, la sueur dégouline dans mes yeux. Mes derniers cheveux sont ébouriffés. J’halète tout en décrochant la cape aux extrémités acérées. Finalement, le plus difficile est encore d’ôter ces foutues bottes. Elles sont comme collées à mes pieds. Peut-être le sang ayant coulé le long de mes jambes a suffisamment coagulé pour les sceller à mes membres. Je lutte en pleine apnée et je parviens finalement à les jeter dans une crevasse non loin. Je suis alors blessé et nu. Je ne suis plus qu’une parodie d’être humain. Peu importe. J’avise l’armoire métallique où j’ai soigneusement rangé mes habits quelques heures plus tôt.

Personne ne doit mettre la main sur ce costume. Personne ne doit me retrouver le portant. Personne ne doit savoir que l’homme chauve-souris ne surveille plus les rues à l’affut du Crime. Je me suis trop battu pour que jamais aucun malfrat ne se sente en sécurité ici. Je ne peux commettre telle erreur. Rien ne doit être découvert. Ils doivent continuer à craindre l’ombre de l’animal. Ils doivent sentir ses yeux perçants sur leurs épaules et douter avoir vu la silhouette de ses ailes dans les ombres. Elle doit continuer d’inspirer la peur, quand bien même je ne serais plus là. Ce n’est pas parce qu’elle a été construite sur des marais que Gotham doit s’embourber.

Je suis à bout de force. Je n’en peux plus. J’aurais du trouver un remplaçant il y a longtemps. Je ressasse et j’anticipe ces derniers moments depuis des années, depuis que j’ai compris que personne ne serait plus digne d’être ce symbole et de protéger la ville d’elle-même.

J’ai assisté aux obsèques du commissaire Gordon la semaine dernière et avec lui, mon dernier vrai allié s’est envolé. Le seul en qui je pouvais encore avoir confiance. Le dernier des Falcone a finalement eu sa revanche. Le projecteur de la police n’illuminera plus jamais le ciel nocturne du symbole que j’ai déjà trop longtemps porté. Le mieux que je puisse faire dans l’immédiat est de parvenir à une parfaite dernière mise en scène et espérer qu’un jour quelqu’un prenne notre relais, que le crime des mafieux ne reste pas impuni.

Je me traîne. Les os brisés et les hématomes constellant mon corps émacié rendent ma progression difficile. J’atteins péniblement l’armoire où se cache les multiples occurrences de l’uniforme sombre. Les traits du visage tirés, implorant la fin, j’enfile les vêtements propres et pliés ; la chemise blanche qui bientôt se tâche irrémédiablement de mon sang, le costume noir qui masque la violence des coups et je tente le nœud papillon. Je me regarde dans le miroir pour m’assurer que je n’ai laissé aucune preuve, aucun indice permettant de me soupçonner et je ne me reconnais plus. Le visage est contusionné, l’œil poché. Une sainte horreur au crépuscule de ma vie. Cette dernière rixe ne m’a vraiment pas épargnée. Je tente d’épousseter un peu la veste mais je n’ai plus la force. Je serre les dents, un œil mi-clos, vrillé par la douleur. Dieu qu’elle est terrible.

Puis je gravis les trop nombreuses marches de l’escalier grisonnant pour me rendre au rez-de-chaussée. Le compte à rebours arrivera bientôt à son dénouement alors j’ignore la douleur et j’essaie de me retenir aux murs pour faciliter mes enjambées. Au passage je bouscule un tableau où sourit la famille Wayne. Je prends soin de lui faire retrouver sa stabilité et je me dirige vers le salon privé du manoir que j’arpente depuis toujours. Je vais m’asseoir dans le fauteuil en essayant de ne pas le salir. Et espérer tenir jusqu’au lever du soleil. En espérant qu’il ne pleuve pas. Et je m’en irais. Ce serait bien comme ça. Après tout, c’est une fin qui ne manque pas de panache pour quelqu’un comme moi. J’ai eu une vie bien remplie, j’ai toujours fait ce que j’estimais le mieux et je ne trahirais pas mes idéaux. Professionnel jusqu’à la mort.

Les dix dernières minutes semblent s’égrener au ralenti. J’ai du tourner deux fois de l’œil depuis que je me suis assis et je me prends à douter de l’efficacité des charges. À l’époque, elles avaient été placées à des endroits stratégiques mais le temps peut avoir eu raison d’elles. Il a raison de nous tous. Quand ils me découvriront, il ne faut pas qu’ils puissent trouver quelque chose. Rien. Je suis rassuré quand le sol se met à trembler. Serein, je soupire et respire pour la dernière fois. La mémoire des Wayne doit rester impeccable. Je me suis toujours battu pour ça. Et ce sera mon dernier combat. Je n’ai véritablement aucun regret quand j’entends les soubresauts des vitrines et des commodes du salon. Je sais pertinemment que la réaction en chaine détruira tout et fera fuir les chauves-souris au dehors.
C’est ce qu’aurait voulu monsieur Bruce.

Ben Wawe 30/05/2011 14h44

Bien joué, bien écrit : je n'ai pas vu la fin arriver. Ma seule critique aurait été sur le langage trop soutenu au début, mais finalement il n'y a rien à dire.
C'est du très bon boulot.

Hilarion 30/05/2011 14h55

Citation:

Envoyé par Ben Wawe (Message 1165408)
Bien joué, bien écrit : je n'ai pas vu la fin arriver. Ma seule critique aurait été sur le langage trop soutenu au début, mais finalement il n'y a rien à dire.
C'est du très bon boulot.

Pareille appréciation.

Bien écrit et amené. La caractérisation du personnage est efficace et respectée.

Le langage soutenu m'a permis de deviner la fin, mais c'est juste parce que je suis un surdoué!:D

yno 30/05/2011 17h52

Merci de vos retours, ça fait plaisir si vous avez apprécié.


Action prod 11/08/2011 10h18

---J' ai apprécié ton texte également. On suit bien le calvaire du personnage et j' ai beaucoup aimé la fin, que je n' avais pas vu venir également. Bravo!

aegnor 13/08/2011 14h42

Très sympa et comme Halna, j'avais vu la fin arriver et perso j'aurais utilisé en langage encore un poil plus soutenu...mais bon dans son état c'est normal qu'il se laisse un peu aller!
:clap::clap:

yno 13/08/2011 15h29

Citation:

Envoyé par aegnor (Message 1189098)
mais bon dans son état c'est normal qu'il se laisse un peu aller!

:D

Merci !

Thoor 10/11/2011 07h14

Bon texte, bien rythmé.
Il faut en écrire d'autres.

Hare Mageddon 11/11/2011 00h57

... pas mieux !

Et bravo ! ! :clap:

Les "A...... souvenirs de m........" donnent peut-être un indice trop rapidement, mais il faut déjà être un "connaisseur" de Batounet ! :huhu:

yno 12/11/2011 10h58

Merci !

Dès que j'ai (et si j'ai) le temps et les idées nécessaires, j'en écrirais une autre !


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