Afficher un message
  #10  
Vieux 14/12/2022, 18h17
Avatar de Dhargo
Dhargo Dhargo est déconnecté
Dieu qui déchire sa race
-Sentinelle du Temple-
 
Date d'inscription: juin 2007
Localisation: Strasbourg
Messages: 10 380
Dhargo est LA légende vivante de ce forum !Dhargo est LA légende vivante de ce forum !Dhargo est LA légende vivante de ce forum !Dhargo est LA légende vivante de ce forum !Dhargo est LA légende vivante de ce forum !Dhargo est LA légende vivante de ce forum !Dhargo est LA légende vivante de ce forum !Dhargo est LA légende vivante de ce forum !Dhargo est LA légende vivante de ce forum !Dhargo est LA légende vivante de ce forum !Dhargo est LA légende vivante de ce forum !
Voici un partage de la part de Laurent Lefeuvre sur sa page facebook. C'est un texte par le scénariste David Cahuvel à propos de cette affaire :


"Dans le petit monde de la bande dessinée, nous avons été nombreuses et nombreux, je crois, à assister avec sidération à la métamorphose de Bastien Vivès. De petit génie du dessin et du récit bourgeois, il s’est lentement transformé en vieux boomer libidineux coincé dans un corps d’éternel adolescent à lunettes. Le première alerte avait été donnée à la parution de « Petit Paul », chez Glénat. Et puis ça a continué… Ou plus précisément, ça s’est confirmé, parce que le mélange jeunesse/sexe (j’écris « jeunesse » parce que dans son travail, peuvent être concernés des enfants, des ados ou de jeunes adultes) était présent dès son premier livre, dont je me souviens parfaitement. Et a traversé la quasi intégralité de son « œuvre ». Il a signé et persisté, dans des interviews, des textes que vous trouverez facilement en tapant son nom dans un moteur de recherches…
Jusqu’à ce que certaines décident que ça commence à suffire et profitent de la carte blanche qui lui sera donné au prochain FIBD pour le dire haut et fort.
S’en suit une séquence relativement prévisible : on expose le problème, on dissèque ses propos, on appelle à la censure, les media s’insurgent contre, le FIBD persiste et signe (c’est sa marque de fabrique), le même Bastien Vivès qui insultait violemment l’autrice Emma en ligne va déposer une main courante parce qu’il reçoit des messages violents, on en parle ici et ailleurs… (EDIT de 11H57 : le FIBD annule l'expo (et c'est une lamentable défaite collective, dont les conséquences seront probablement tout sauf réjouissantes) ).
… Et tout ça n’est pas nouveau. Les gens qui s’intéressent au féminisme le savent bien. Parce que la pédocriminalité et l’inceste, font partie du « socle patriarcal » qui gouverne notre société. Et parce qu’une partie de l’art, bourgeois ou non (mais souvent) et des intellectuels français les a toujours célébrés, de manière plus ou moins discrètes… Dans les œuvres (« Petite » de Ferré, « Noces blanches » de Brisseau, « Lemon Incest » de Gainsbourg, et ne parlons pas de Matzneff, David Hamilton et consorts) et dans les interviews (Claude François) ou dans des manifestes de sinistre mémoire : https://www.radiofrance.fr/.../quand-des-intellectuels.... Et ce n’est qu’un bref assortiment, dont on notera au passage mais sans surprise, qu’il ne concerne quasiment que des hommes.
En cela, Vivès ne fait que s’inscrire dans une tradition bourgeoise qui a longtemps bénéficié, dans l’espace médiatique d’une impunité totale, quand ce n’était pas d’une franche sympathie. Les « confessions » de ces artistes étaient des « provocations », on voulait « choquer », les œuvres étaient « en eaux troubles », « chargées de « tension », « borderline », « déconcertantes » ou « interrogeaient la société » (qui a, depuis, répondu… Par la loi) … Et nous, enfants et adolescent.e.s que nous fumes, et adultes que nous sommes devenu.e.s, avons été exposé.e.s toute notre vie à ce salmigondis artistico-dégueulasse, et sommé.e.s de l’accepter, sous peine d’être de lamentables censeurs, d’ignobles père/mère la morale ou plus simplement des imbéciles qui ne comprenaient rien à l’art et à la création.
Pour eux, il n’y avait pas de problème. Mais pour la très grande majorité d’entre nous, il y en avait bien un, de problème… Quelque chose n’allait pas… Mais nous n’arrivions pas à dire précisément quoi ou bien les mots nous manquaient pour dire notre malaise, notre désaccord, notre absence de consentement à être les témoins de cet insupportable étalage névrotique.
Le désir pour les enfants existe. C’est un sujet de société très important. Grave, même, si on pense à toutes celles et ceux qui sont victimes de la pédocriminalité. Et qui mérite qu’on regarde le problème en face. Qu’on s’en empare, qu’on en parle, qu’on écoute les gens qui étudient la question, qu’on se construise une culture commune et qu’on prenne des décisions. Ensemble.
Mais c’est justement en raison de cette gravité qu’on ne peut pas laisser Bastien Vivès dire et faire tout ce qui lui passe par la tête sans réagir. Même lui devrait être capable de comprendre ça.
Et tout ça n’est qu’une partie du problème que notre société entretient, de manière plus large, avec le corps des femmes et sa fascination pour les corps infantiles, principalement féminins, sexualisés… Triste passion qu’il partage avec le Japon, dont j’espère qu’un jour on questionnera la représentation du corps des femmes en mettant les mangas concernés (et ils sont légion) sur la sellette parce que c’est un vrai problème, et autrement important, en termes de personnes « contaminées », que le cas Vivès…
Pour alléger cette tartine indigeste et parce que j’en parlerai tellement moins bien, je ne peux que vous suggérer, à ce propos, d’écouter ces deux formidables podcasts :
https://www.binge.audio/.../les.../la-loi-de-linceste
https://www.binge.audio/.../les.../qui-sont-les-incesteurs
Et cette série bouleversante :
https://louiemedia.com/injustices-2/ou-peut-etre-une-nuit
Elles vous en diront bien plus et bien mieux que moi sur le lien organique qui unit la pédophilie et l’inceste à ce patriarcat dans lequel nous nous débattons toutes et tous du mieux (et parfois du pire, donc) que nous pouvons…
Heureusement, et « l’affaire Vivès » en est la preuve, les choses changent, mais à l’évidence, tout le monde ne l’a pas compris. Pour preuve la réaction de l’intéressé, qui semble stupéfait qu’après avoir, par exemple, écrit (à propos d’une autrice), « J’aimerais qu’un de ses gosses la poignarde et qu’il fasse une BD sur « comment il l’a poignardé » et qu’il se fasse enculer à chaque like » ou déclaré dans une interview « moi, déjà l’inceste, ça m’excite à mort. Non mais pas l’inceste dans la vraie vie, l’inceste raconté, je trouve ça génial. », on ose un jour lui demander des comptes. Alors que ce qui est vraiment stupéfiant, dans l’affaire, c’est que ça ait pris autant de temps. Et on n’omettra évidemment pas de noter au passage que jamais ô grand jamais Bastien Vivès n’aurait osé écrire la même chose à propos d’un auteur, pour des raisons que tout le monde comprendra aisément.
Bastien Vivès a un problème. Mais en fait, nous avons tous un problème. Et il est plus que temps de le regarder en face.
« Il faut croire que l’artiste appartient à une caste à part, auquel nous offrons un mandat de toute-puissance, sans autre contrepartie que la production d’une œuvre originale et subversive, une sorte d’aristocrate détenteur de privilèges exceptionnels devant lequel notre jugement, dans un état de sidération aveugle, doit s’effacer. » Vanessa Springora (Le Consentement)
PS : je profite d'une retouche pour ajouter ceci : je n'ai pas signé la pétition. L'interdiction est toujours un échec collectif. Mais je lui reconnais la vertu d'avoir levé le débat... C'est déjà beaucoup. Et c'était plus que nécessaire.

David Chauvel "
Réponse avec citation