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Vieux 26/03/2007, 14h05
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Niglo change la caisse du Fauve


An Accidental Death
(Fantagraphics, novembre 1993)

Scénario : Ed Brubaker.
Dessin : Eric Shanower.


Aujourd’hui, séquence ‘mon Dieu comme le temps passe, ma bonne dame, c’est fou non mais vraiment’. En ressortant des cartons le comic-book dont il va être question aujourd’hui, je me rends compte que cela fait maintenant une quinzaine d’années qu’Ed Brubaker a débuté.

An Accidental Death n’est pas tout à fait son premier travail professionnel, Il avait commencé à publier Lowlife l’année précédente, ainsi qu’un court récit dans Dark Horse Presents #50, mais c’est la première œuvre qui l’a fait remarquer (et lui a valu une nomination aux Eisner Awards). Paru à l’origine en 1992 dans Dark Horse Presents #65-67, ce récit fut réédité l’année suivante chez Fantagraphics.

Contrairement à Lowlife, An Accidental Death n’est pas un récit autobiographique, même si Brubaker s’inspire de quelques éléments réels (dans sa prime enfance il a passé quelques années à Guantanamo, où se situe l’action de ce récit, tout comme Eric Shanower, quelques années plus tard) et utilise une forme de narration similaire (récit au passé et à la première personne).

An Accidental Death raconte l’histoire de deux adolescents, Charlie et Frank, fils de militaires stationnés à Guantanamo Bay (qui était une base navale américaine bien avant de se faire connaître pour une tout autre raison). Cette enclave américaine située au sud-est de Cuba, entourée de grillages et de champs de mines, constitue une petite communauté vivant en autarcie, repliée sur elle-même, et offrant remarquablement peu de distractions à ses habitants. Dans ces conditions, toute nouveauté est bonne à prendre, et les deux adolescents vont s’intéresser de très près à une famille récemment arrivée à Guantanamo, famille tout ce qu’il y a de plus ordinaire, si ce n’est que la mère de famille est une naine. Oui, Charlie et Frank s’emmerdent à ce point dans la vie qu’ils vont passer leurs journées à épier les membres de cette famille, allant jusqu’à jouer aux voyeurs sous leurs fenêtres. La lubie va rapidement tourner à l’obsession, en particulier pour Frank, qui va tomber amoureux de la fille aînée, sans que l’inverse soit vrai. Et l’obsession va finir en drame, lorsque Frank va réveiller Charlie en pleine nuit pour lui annoncer que la jeune fille est morte…


A partir de ce fait divers inventé de toutes pièces, Ed Brubaker dresse le portrait de deux adolescents presque ordinaires, dont la vie va basculer brutalement. Pas de suspense ni de retournement de situation ici, le scénariste opte pour un déroulement linéaire, inexorable dans sa progression, dramatique dans sa résolution. Et le récit à la première personne lui permet de faire ressentir le sentiment de culpabilité de son narrateur, même des années après les faits.

Contrairement à Brubaker, Eric Shanower n’est déjà plus un débutant lorsque paraît An Accidental Death. Depuis plusieurs années déjà, on a pu apprécier son talent, en tant que dessinateur et/ou encreur, sur Nexus, le Garage Hermétique de Moebius (paru chez Epic aux Etats-Unis) ou plus occasionnellement sur quelques projets DC. On retrouve donc ici son style particulièrement méticuleux, ses panels chargés parfois jusqu’à l’excès, mais d’une précision et d’une élégance assez extraordinaires. Son trait ultra-réaliste et son utilisation du noir et blanc conviennent à merveille à ce récit.

Bien qu’on ne puisse pas parler de polar à proprement parler, on retrouve dans An Accidental Death l’ambiance de roman noir qui caractérise une bonne partie de l’œuvre d’Ed Brubaker, de Scene of the Crime à Sleeper. C’est loin d’être son œuvre la plus aboutie, mais tous ceux qui ont apprécié les travaux du scénariste dans sa veine la plus noire devraient apprécier.

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