Discussion: Jazz !
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Vieux 22/12/2013, 17h48
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Hawkguy
 
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[IMG]http://img11.nnm.ru/2/b/1/3/4/2b1349c04881a88a278d3e50e022a2fc.jpg[/IMG]

Enregistré en 68 mais seulement édité en 80, cet enregistrement valait la peine d'être découvert, même si ce n'est pas le plus célèbre de [B]Lee Morgan[/B], un des trompettistes les plus actifs de son époque, figure emblématique des Jazz Messengers d'Art Blakey.


Pour s'en convaincre, il suffit d'examiner les noms qui forment la section rythmique du disque : John Higgins au piano, Reggie Workman à la contrebasse et Billy Higgins - ces trois-là, c'est de la dynamite !
Néanmoins, les crédits sont un peu trompeurs : par exemple, George Benson joue bien de la guitare mais figure seulement sur la moitié du programme (mais quel bonheur là encore).


Aux côtés de Morgan, on trouve Bennie Maupin au saxo ténor et ensemble, ils se partagent des solos pimentés, chacun poussant l'autre dans ses retranchements et donnant un tonus épatant aux morceaux. Les titres sont un peu curieux ("Avotcja one", "Haeschen", "Durem"), plutôt exotiques mais ce sont pratiquement tous des "boogaloos" au groove irrésistible, composés par le trompettiste (pour 4 d'entre eux, les deux autres étant signés par Hicks et Carl Massey) : Morgan puise en effet dans ce mélange de soul, de rythm'n'blues, et de rythmes afro-cubains qui a profondément irrigué le jazz depuis le début des années 60.


C'est du hard-bop classique mais puissant, tout à fait à l'image du son de la trompette de Morgan, chez qui les tempos soutenus étaient une vraie marque de fabrique. Il n'y a que deux ballades pour calmer le jeu, dans un style plus gospel et lyrique où le musicien est aussi à l'aise.

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[LEFT][IMG]http://www.vintners.net/%7Emikel/art_pepper/picture_of_heath/chet_baker_art_pepper-picture_of_heath-front.jpg[/IMG]
Quand il enregistre [B]Picture of Heath[/B], [B]Chet Baker[/B] est d'abord en compagnie du musicien qui lui correspond le mieux, le saxo alto [B]Art Pepper[/B]. Ils se retrouveront à deux autres reprises, avec le même bonheur dans le résultat à chaque fois.

Les deux "Playboys" sont entourés d'un quartet composé de Carl Perkins (aucun lien avec la star du rockabilly) au piano, Larance Marable à la batterie, Curtis Counce à la contrebasse et Phil Urso au saxo ténor. Cette formation produit un jazz cool, fabuleusement mélodique, où chacun complète l'autre à merveille, une musique au charme imparable.

Art Pepper est un mélodiste magnifique et amène avec lui deux titres ("Minor Yours" et "Tynan Time"), mais la majorité du programme est l'oeuvre de Jimmy Heath, qui fut à la fois saxophoniste, flûtiste et arrangeur émérites.
Chet Baker reconnaît dans ces compositions un matériel à sa mesure, élégant et lyrique, et sa complicité avec Pepper qui s'illustre dans le même registre est éclatante.

Le revers de la médaille dans ce cas-là est que les autres membres du combo sont un peu réduits à jouer les utilités, les faire-valoir. Mais Urso, Perkins, Counce et Marable semblent accepter leurs rôles et valorisent les deux vedettes avec beaucoup de verve et d'humilité : sur un titre comme "For Minors Only", le groupe sonne de manière épatante. On est alors au soleil, à Los Angeles, et ce west coast jazz lumineux et cool vous fait chavirer de bonheur.

[IMG]http://jazzdiscography.j.a.pic.centerblog.net/5d6f0b1f.jpg[/IMG]

Deux ans après [B]Picture of Heath[/B], [B]Chet Baker[/B] ne le sait pas encore (ou en tout cas il n'en mesure pas l'importance) mais il s'apprête à plonger dans l'interminable gouffre que sera son existence : la drogue, l'alcool, la prison, vont briser ce beau jeune homme dont la musique ne brillera plus qu'épisodiquement, parfois de manière céleste, parfois de manière pathétique.

L'album [B]Chet[/B], c'est donc en un prénom tout un programme, une sorte d'ultime coup d'éclat, de chef d'oeuvre que l'avenir du musicien rendra plus poignant encore. Ecoutez le son déchirant de la trompette sur le premier titre, l'extraordinaire "Alone together", et vous comprendrez à quel point le jazz peut produire, par la grâce d'une trompette sur une mélodie qui habite son interprète, comme émotion. Baker va si haut, si intensément, qu'on ne peut qu'être saisi par sa musique.

Tous les titres semblent annoncer la catastrophe : "How high the moon", "It never entered my mind", " 'This autumn", "I you could see me now", "September song", "Time on my hands", "You and the night and the music". Quel programme !

La pochette, elle-même sublime, de l'album raconte une histoire déjà, et les partenaires de Chet sur cet enregistrement constituent une des formations les plus accomplies qui soient, réunie fin Décembre 58-début Janvier 59 à New York par le fidèle producteur Richard Bock. Herbie Mann à la flûte, Pepper Adams au saxo baryton, Bill Evans au piano, Kenny Burrell à la guitare, Paul Chambers à la contrebasse, Philly Joe Jones à la batterie : quelle équipe d'orfèvres ! Ils paraissent tous jouer pour Baker, comme s'ils l'accompagnaient avant un long voyage.

C'est triste, oui, mais qu'est-ce que c'est beau !

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[LEFT][IMG]http://365jazz.files.wordpress.com/2011/01/john-coltrane-blue-train.jpg[/IMG]

Quand j'ai commencé à m'intéresser sérieusement au jazz, comme sans doute beaucoup d'amateurs, deux musiciens me semblaient incontournables : [B]Miles Davis [/B]d'un côté, [B]John Coltrane[/B] de l'autre. La trompette et le saxo, les deux instruments qui résument le mieux cette musique en somme. J'ignorai alors que les deux hommes avaient longtemps joué ensemble.

Les années ayant passé, je n'écoute plus guère ni Miles ni Coltrane, simplement parce que je me suis lassé ou alors ils m'ont semé en route. J'ai aujourd'hui plus de plaisir à écouter ou découvrir des musiciens, moins connus parfois, et dans une période donnée (en particulier la décennie 1955-65), chez qui on trouve des albums d'une qualité parfois supérieure, avec des formations qui peuvent être traditionnelles ou atypiques.

Néanmoins, s'il y a un album de Coltrane pour qui je garde une affection intacte, c'est ce [B]Blue Train[/B], un beau disque de blues-jazz, accessible et dense, authentique classique sans que cette distinction soit usurpée.

John Coltrane, en 1957, a déjà pas mal roulé sa bosse en accompagnant Dizzy Gillespie et donc Miles Davis. C'est aussi à ce moment-là qu'il s'éveille spirituellement, et cet aspect ne cessera de guider son évolution musicale (les titres de ses albums en témoignent souvent) : ainsi s'est-il converti à l'Islam (arrêtant de consommer de l'alcool et de la drogue) et vient-il de se marier.

Miles Davis a repéré le talent de ce saxophoniste et l'enrôle dans son quintet - une association mémorable quoiqu'assez courte en vérité (Hank Mobley lui succédera). Coltrane n'est pas encore une star à cette époque, les critiques et le public ne voient d'ailleurs en lui qu'un faire-valoir de Miles.

En 58, Coltrane commence à s'émanciper et enregistre pour la première fois comme leader. Il s'entoure bien avec le pianiste Kenny Drew, Paul Chambers à la contrebasse, Philly Joe Jones à la batterie, et se choisit comme trompettiste Lee Morgan (déjà membre régulier des Jazz Messengers et dont le style est aux antipodes de celui de Davis...). Le saxophoniste compose la majorité des titres de son [B]Blue Train[/B], sans savoir qu'il écrit de futurs standards, influencé par le gospel et le blues plus que par le be-bop (la pochette bleue indique déjà la tonalité du disque).

Le morceau-titre est un déjà un pic avec ses 10' et quelques, s'ouvrant par un solo de batterie superbe. Le saxo de Coltrane possède déjà cette capacité à délier la mélodie comme une mélopée orientale.
Ironie du sort pourtant, Lee Morgan domine les débats et va en fait voler la vedette à Coltrane sur le reste du programme : à tout juste 20 ans, l'éclosion du trompettiste préfigure celle de Freddie Hubbard, autre prodige précoce qui n'avait peur de personne. La clarté et le punch de Morgan sont irrésistibles et dynamise (dynamite) le blues, auquel la rondeur des solos de Curtis Fuller au trombone vient s'ajouter.

L'album déroule ensuite 4 autres titres qui alternent ballades aériennes et tempos soutenus ("Moment ‘s Notice", "Locomotion"). Coltrane prend la mesure de Morgan et s'aligne sur lui (plus que l'inverse), mais leur dialogue/duel est jubilatoire, ponctué là encore par le trombone, et une section rythmique très efficace, présente sans être envahissante
"I’m Old Fashioned" est sans doute l'autre sommet du programme, et cette ballade offre à Coltrane son grand moment, seulement soutenu par le piano par endroits. Dans ce registre langoureux, le saxophoniste est à nouveau le patron, breakant parfois avec des envolées brèves mais remarquables. C'est une respiration de 8' magistrales.

Puis "Lazy Bird" clôt l'affaire : rythme rapide qui contraste avec des solos alternés entre la trompette et le saxo plus mélancoliques, soulignés par le trombone et le piano qui ont aussi droit à de l'espace, et même la contrebasse où Chambers utilise l'archet.

Simple, sobre, efficace, porté par le swing ravageur de Lee Morgan, le "Train Bleu" de Coltrane mérite bien son statut iconique et la place de favori dans le coeur de Coltrane, cet aventurier du saxophone.

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[LEFT][IMG]http://www.bronxbanterblog.com/wordpress/wp-content/uploads/2012/01/bluenote1.jpg[/IMG]

[B]Hank Mobley[/B], que des "jazzologues" ont surnommé le "champion des poids moyens du saxo ténor" avec un brin de condescendance (les champions poids lourds étant John Coltrane et Sonny Rollins), livre avec [B]Workout[/B] son troisième opus majeur (après Soul Station et Roll Call). C'est à nouveau un disque plein d'énergie, disposant d'une formation extraordinaire, avec le batteur Philly Joe Jones, le bassiste Paul Chambers, le pianiste Wynton Kelly, et surtout le guitariste Grant Green.

Car la présence de Green est véritablement la plus-value de ce disque auquel il apporte sa touche bluesy si élégante. Il était le guitariste parfait pour Mobley puisqu'il s'inspirait davantage des joueurs de trompette et de saxos que de guitare pour élaborer son jeu. La façon dont Mobley et Green dialoguent sur le titre "Uh Huh" est un des pics de cette session.

La section rythmique, on l'a vue, est elle aussi une "dream team" : dotée d'un swing plein d'aplomb, elle est dominé par la batterie tout à tour volcanique et tendre de Jones tandis que Kelly aligne des lignes de piano d'un raffinement somptueux.

Mais, comme je l'ai dit, Workout est réellement l'avènement de Mobley comme leader : le son qu'il déploie avec lyrisme est sans égal alors. On entend là un soliste qui sait à quel point chaque note compte et qui interprète chacune de ces notes avec une justesse, un à-propos fabuleux. Tous ses solos sont parfaitement dosés en durée et en puissance, il sert les mélodies royalement.

La liste des morceaux reflète elle aussi la force évocatrice du jeu du ténor, jugez-en : "Workout", "Uh Huh", "Smokin", et "Greasin' Easy", tous ces titres suggèrent parfaitement le projet de Mobley. Compositeur de talent, Hank prouve définitivement qu'il est un interprète hors pair quand on écoute "Three Coins in the Fountain" et le renversant "The Best Things in Life Are Free".

C'est vraiment le sommet d'Hank Mobley, accompagné par une équipe elle-même en état de grâce - une suite (Another Workout), enregistré quelques mois plus tard (hélas ! sans Grant Green) démontre qu'il ne s'agissait que du premier acte d'un projet majeur.

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En 1963, [B]Hank Mobley[/B] enregistre [B]No Room for squares[/B] et c'est l'occasion d'apprécier l'évolution de sa musique.

En effet, le jazz scintillant des précédents disques a laissé place à un hard-bop plus agressif qui doit sans doute beaucoup à John Coltrane et à la volonté de Mobley de visiter plus avant les sonorités blues. Le saxophoniste a réuni un combo qui lui permet d'aller dans cette direction car tous les musiciens sont familiers avec elle : on retrouve donc Lee Morgan à la trompette, le pianiste Andrew Hill, le bassiste John Ore et le batteur Philly Joe Jones - tous habitués à produire un son dur, énergique.

Le morceau qui donne sont titre à l'album (et qui a droit à deux versions d'égale qualité) donne le "la" au programme : Mobley démarre avec un solo plein de vigueur que vient relayer Hill avant que le saxo et la trompette reprennent le dessus suivant les changements de ton du piano. Il y a quelque chose de viril et de sexy dans le groove de ce disque et les compositions traduisent clairement ce sentiment : "Me 'n' You" est aussi très punchy et évoque même le rythme de la samba.
Lee Morgan et Mobley sont tour à tour dans une posture de duettistes-duellistes, chacun assurant sa partie comme s'il poussait l'autre à le rattraper puis le dépasser en intensité : c'est redoutablement efficace, cela donne à la tracklist des couleurs sauvages, fauves, sans sacrifier la mélodie. Hill et Jones les accompagnent en maximisant le relief de leurs solos et se ménageant de l'espace.

Ces 8 morceaux sont imparables, fluides autant que nerveux, comme s'ils replongeaient aux racines du hard-bop. Et puis, quelle pochette !
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Dernière modification par wildcard ; 22/12/2013 à 18h52.