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  #196  
Vieux 17/05/2010, 10h45
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Ben Wawe Ben Wawe est déconnecté
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Merci ! J'ai longtemps eu du mal avec la narration au présent mais je l'apprécie de plus en plus. Pour livrer les pensées d'un personnage, je pense maintenant qu'il n'y a pas mieux.
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  #197  
Vieux 16/06/2010, 18h07
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Je viens de finir ton dernier texte. Bonne idée et bonne réalisation. Il y a une ambiance sterssante qui faonctionne bien. UNe grand Clap a toi.

PS: Il y a quelques répétitions
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  #198  
Vieux 16/06/2010, 18h11
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Merci.
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  #199  
Vieux 10/07/2010, 17h30
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Fallait que ça, ça sorte. J'espère retrouver mon mojo après ça.

La page blanche.

Rien. Ca ne veut pas. Ca ne veut toujours pas.

D’un geste rageur, je referme l’écran de mon ordinateur portable. Je suis énervé : ça fait deux heures que j’essaye d’écrire. Deux heures. Pour rien. Rien de rien. Ou plutôt si… j’ai écris quelque chose. Mais de la merde. C’est encore pire que rien écrire, au fond. C’est pouvoir écrire mais sans être efficace. Sans avoir la magie.

J’ai besoin d’air, de souffler. Mais j’ai l’impression que je ne fais que ça en ce moment : me reposer, m’aérer l’esprit, glander. J’écris, ou en tout cas j’essaye d’écrire. Ce n’est pas mon activité principale… pas encore, j’espère. Je suis étudiant, encore. C'est-à-dire glandeur professionnel pour beaucoup de gens, mais ce n’est pas toujours vrai.
C’est sûr, c’est bien plus facile que l’usine, balayeur ou même caissier, mais quand on bosse et qu’on rentre chez soi, c’est très souvent le moment du repos. Ce n’est pas vraiment le cas pour les étudiants, qui doivent en général encore réviser, apprendre ou disserter chez eux. Je ne me plains pas, je constate.

Au fond, c’est encore sympa d’être étudiant : il y a des avantages, il y a des copains mais ça laisse peu de temps pour le reste. Pour écrire, surtout.
Oh, je sais bien que ça sera la même chose quand je bosserai : j’aurais encore moins le temps, je râlerai encore plus. Je sais que mes années universitaires sont le meilleur moment pour m’entraîner, pour m’affirmer, pour vivre ma passion.
Mais il y a un problème : ça fait trois mois que j’ai le complexe de la page blanche.

Je sais, c’est cliché mais c’est comme ça. Depuis trois mois je n’arrive plus à aligner une page correcte, ça ne marche juste plus. Je pensais que ça ne m’arriverait jamais, que je n’aurais pas à souffrir d’une telle saloperie.
Pendant des années, j’écrivais des tonnes par mois, voire même par semaine. J’étais boulimique de l’écriture, enchaînant nouvelles, séries, etc. J’écrivais énormément, oui. Pas toujours avec la meilleure des qualités, mais j’enchaînais, encore et encore. Je riais presque de ceux qui n’arrivaient pas à écrire, ne comprenant pas pourquoi et comment ceux qui se disaient passionnés n’y arrivaient juste plus. J’étais insouciant et je me pensais différent, ou au moins plus « intègre » qu’eux.
J’étais un beau crétin.

Je ne sais pas d’où vient la « panne », d’où vient ce manque d’envie, ce manque d’allant. Des problèmes personnels ? J’en ai eu, j’ai été servi même depuis quelques mois mais… ça va. Ce n’est pas monstrueusement grave non plus, ça a pu être arrangé et géré. Et même : je n’ai pas vécu une perte, je n’ai pas été abandonné. Je vais bien, la majorité de ma famille va bien, mon amie va bien.
Ce n’est pas ça. Ca ne peut pas être ça, comme excuse.

Des problèmes professionnels, alors ? Oui, bien sûr : ne pas savoir ce qu’on veut faire de son avenir peut bloquer, mais j’avais déjà ça avant. Choisir, ça n’a jamais été mon truc, et malheureusement pour moi, je m’en sors assez bien pour avoir plusieurs pistes devant moi pour les années à venir. Bien sûr que tout ça peut me bloquer, bien sûr que tout ça peut jouer, mais ça n’est pas ça la raison principale du blocage.
Ca n’est pas ça qui m’empêche de « respirer », comme je le disais avant. Car oui, avant, je considérais qu’écrire m’était autant indispensable que l’oxygène. Maintenant, j’étouffe et je ne parviens pas à ouvrir grand la bouche pour inspirer. Et ça me fait peur.

Je crois que c’est ça la clé, en fait : la peur. Ma peur.
Comme tout le monde, j’ai peur. Personne ne peut éviter ce sentiment, personne ne peut être frappé par une phobie. Ceux qui disent ignorer la peur sont des crétins. Ce n’est pas être courageux que de vouloir ignorer la peur. Être courageux, c’est faire face à sa peur, l’accepter et aller de l’avant quand même. Et c’est ça que je n’arrive pas à faire.

Je ne suis pas l’homme le plus brave du monde. Je n’ai jamais voulu l’être, bien sûr, mais je n’arrive pas à faire face à ce que je crains le plus.
L’échec.
La critique. Négative.

Oh, je sais : chaque écrivain devrait être son autocritique et accepter les critiques d’autrui comme un cadeau pour avancer, pour évoluer, pour faire mieux encore. C’est le mieux à faire, oui. Mais c’est difficile d’accepter les jugements des autres, d’entendre ou de lire qu’une idée ou qu’une histoire est mauvais ou devrait être remaniée alors que vous avez passé des heures dessus.
C’est dur, oui. J’ai un égo, comme tout le monde, et il est très sensible sur le registre de l’écriture. Tout simplement parce que c’est ce que j’aime faire et parce que je veux en faire mon métier.

C’est là où est mon problème, mon blocage.
J’ai peur qu’on me dise que je n’ai pas le niveau. J’ai peur d’apprendre que je ne suis pas assez bon pour vivre ma passion et en vivre. J’ai peur d’échouer.

Alors je me bloque. Je ne tente pas. Ou plus, en fait.
C’est nul, je le sais. J’en ai honte, mais c’est comme ça. Je suis terrifié à l’idée d’échouer alors je ne me lance pas. Je sais que j’échouerais alors immanquablement, mais… comme ça j’aurais une excuse. Ca sera de ma faute mais je ne saurais jamais si j’avais le niveau ou pas. J’aurais des regrets mais je ne me serais pas pris une claque éventuelle.
Heureux les ignorants. Sauf que je ne suis pas heureux.

Tout ça, ça me rend malheureux. J’aime écrire. J’aime ouvrir un fichier Word et passer des heures dessus, écoutant inlassablement certaines musiques pour réussir à faire quelque chose. J’aime sentir la sueur qui dégouline le long de ma colonne, j’aime avoir les yeux qui piquent à force de fixer l’écran, j’aime avoir des crampes aux jambes et les fesses collées au siège.
J’aime être dans ce que je fais, j’aime créer. J’adore ça : partir d’une idée, imaginer un monde, des personnages, des situations. Être un créateur, décider de ce qui va se passer. Mais aussi dire quelque chose, essayer de transmettre une idée, une révolte, un sentiment dans mes écrits. C’est le plus dur, ça. Mais c’est le plus gratifiant quand ça fonctionne.

J’aime écrire, mais j’aime aussi recevoir des éloges… oui, je suis égocentrique. J’aime qu’on me dise qu’on aime ce que je fais. C’est pour ça que j’ai peur de vraiment me lancer : j’ai peur que ça change. J’ai peur de perdre encore confiance en moi. C’est con mais c’est comme ça que je marche. Comme un crétin, je m’énerve quand on n’aime pas ce que je fais.

Oui, c’est bête. Parce que je m’empêche de faire ce que je veux, à cause de ça. Parce que je ne vais pas au bout. Parce que je reste un écrivaillon alors que j’aime ça et que je veux être écrivain. Oh, je sais bien qu’être professionnel ça sera peut-être trop dur, mais… être publié. Avoir quelque chose tiré de moi-même dans les mains. Montrer à tous que je suis capable de quelque chose. Que je ne suis pas qu’un gentil garçon qui travaille bien à l’université.
Je ne veux pas être oublié, je crois. Beaucoup d’artistes ont cette peur et je ne suis pas original en la partageant. Ouais, je suis terrifié par beaucoup de choses, mais ça me fait cogiter. Je mourrais. On mourra tous. Et je ne veux pas être oublié, je ne veux pas que ma vie soit simplement une voie classique et logique. Bien sûr, mes proches se souviendront de moi, mais au bout de trois générations ça sera fini. Je ne serais qu’un grain de sable envoyé au vent, aussi inutile que la fourmi qu’on écrase.
Ca ne me suffira pas.

Même si je ne suis édité que pour un livre, même s’il ne se vendra pas, au moins… au moins, j’aurais fait quelque chose qui ne sera pas oublié. J’aurais participé à l’Histoire. J’aurais été là, et certains pourront le savoir. C’est important pour moi.

Seulement, ça ne fonctionnera pas si je ne m’y remets pas. J’ai peur. Je suis terrifié par l’idée de la critique négative, par l’idée d’échouer. Mais… je n’ai pas le droit de ne pas essayer. Je n’ai pas le droit d’avoir des regrets : je peux essayer. Je peux échouer. Mais j’ai les capacités pour tenter, alors… je le dois. Je me le dois.
Ce n’est pas une question d’honneur, ou même de mon image par rapport à mes proches. C’est moi face à moi-même.

La page blanche ? C’est un blocage. Mais je dois le surmonter. Même si j’échoue… même si j’ai peur, même si j’aurais toujours peur. Je dois vivre avec ça, parce que sinon… sinon, je ne sais pas si je vivrais encore. C’est ma passion, une partie de ma vie. Même si d’autres diront que c’est mauvais, ça restera toujours en moi. Je ne perdrais personne à essayer et à échouer. Je ne la perdrais pas.

Ca sera dur mais c’est comme ça que ça marche. Ca fait mal au début, on a peur mais on continue parce qu’on en a besoin. Comme pour les enfants qui naissent, qui crient quand ils respirent et qui ne peuvent s’en passer.
Je dois respirer. Et j’ai recommencé, là, maintenant. Ce n’est pas parfait, ça prend du temps, ça fait un peu mal… mais c’est là. Ca recommence. Et ça fait du bien.
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  #200  
Vieux 10/07/2010, 17h49
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argh!
la page blanche!
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"l'homme qui a perdu la faculté de s'émerveiller et d'etre frappé de respect est comme s'il avait cessé de vivre" A.Einstein

Excusez mon humour de chiottes mais c'est parce que j'y mets tous les déchets de mes sentiments.
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  #201  
Vieux 10/07/2010, 17h56
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Je t'ai mis un point de réput' vide, blanc, Omo.
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  #202  
Vieux 10/07/2010, 17h57
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Citation:
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  #203  
Vieux 10/07/2010, 17h59
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Je lave plus blanc que Laurent Blanc.
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  #204  
Vieux 21/07/2010, 18h15
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Toi aussi.... la page blanche, cette infâme compagne de ces derniers mois t'a tenu compagnie?

Bon texte sur le ressentis devant cette 'panne' bien injuste.
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  #205  
Vieux 05/08/2010, 17h54
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Un petit texte, tout à fait accessoire, pour me reprendre un peu en mains et écrire ce que j'aime : de l'introspection, des dialogues et de la géopolitique (un peu naïve je pense). A noter qu'il se trouve aussi sur mon blog pour les courageux qui oseront dépasser le design vide : http://benthomas.over-blog.com/artic...-54980549.html . Bonne lecture !

L’autre monde
5 août 2010


C’était bon. Il avait fini.
Ses yeux se fermaient sous la fatigue, ses mains épuisées malaxaient son crâne en écartant les cheveux de son visage. Il était exténué mais un sourire pointait quand même au coin des lèvres. Il était content. Malgré les heures passées devant l’écran, malgré les sacrifices, malgré les cris de sa compagne et les portes qui claquent, il y était parvenu.

Il avait entamé ce long périple deux ans auparavant, se coupant volontairement de ses contacts habituels, de ses amis et de ses proches dernièrement pour parvenir à cette centaine de pages sur le sujet qui risquait de lui coûter sa carrière. Journaliste, Al avait décidé de s’en prendre à certaines personnes qui n’aimaient pas que les gens comme lui découvrent leur existence, et il était conscient que peu de journaux oseraient publier le fruit de son enquête. Aucun, même.

Pour autant, maintenant, avec Internet, les choses changeaient. Il avait prévu de publier la première partie de sa série d’articles sur de multiples sites protégés, de façon à ce que les sécurités tiennent assez de temps pour que le buzz se fasse. A peine une journée suffirait pour qu’une partie de la population soit informée du contenu de son enquête, et alors tout commencerait.

Bien sûr, il serait poursuivi par ceux qu’il veut faire tomber. Bien sûr, il allait perdre beaucoup de temps au tribunal et il aura beaucoup de mal à retrouver un emploi correct dans les années à venir. S’il parvenait à ses fins, il éclaboussait ceux qu’il avait pris comme cible et peut-être même certains ne s’en relèveraient pas. Il avait peu d’espoir, mais c’était possible. Il pouvait réussir et faire éclater la vérité.
Cependant, ça impliquerait de perdre beaucoup… beaucoup trop, pour certains. Mais pas pour lui. Même si sa carrière en prenait un coup, au moins pourrait-il se regarder dans la glace dans les années à venir.

Au moins pourrait-il se dire ça quand ses cibles survivantes s’en prendraient à lui dans une quête vengeresse, quand elle partirait après en avoir eu assez d’être avec un utopiste, voir un naïf selon elle. Même si elle s’accrochait pour l’instant, Al était certain que tout ça finirait ainsi. Lui, seul, vieux, abandonné de tous, ne trouvant du réconfort que dans les articles de journaux accrochés sur son mur et dans les fonds de bouteille qui deviendraient ses futurs meilleurs amis.

Le tableau n’était pas du tout agréable mais il était réaliste : s’en prendre aux puissants était une chose à part, il fallait être bien conscient de ce que ça impliquait. Al lui savait ce qu’il faisait et ce qu’il allait devoir endurer. Il savait que son monde allait bientôt changer et que ses plans de carrière allaient s’écrouler.
Pourtant, il n’hésiterait pas : il affronterait tout ça en face, regardant dans les yeux ceux qui le traîneront dans la boue et qui voudront faire pression sur lui. Et il ne faiblirait pas. Il avait le courage et la folie de la jeunesse, tout comme son inexpérience. Il n’avait pas encore suffisamment vécu et souffert pour craindre à nouveau la douleur et les remords. Il allait se servir de tout ça pour encaisser… pour continuer, même si personne ne voudrait le soutenir.

Lentement, il déplia ses jambes endolories par une position assise trop longue et trop inconfortable. Ca faisait deux semaines qu’il avait pris une chambre d’hôtel, refusant de continuer son travail dans leur appartement – autant pour éviter de la mettre en danger que pour être tranquille. Elle ne comprenait pas ou ne voulait pas comprendre : elle était persuadée que tout ça n’en valait pas la peine et qu’il regretterait d’avoir osé lancer ça sur la Toile quand il verrait toutes les conséquences.
Lui savait qu’elle se trompait mais il préférait la laisser parler et s’énerver. Le dialogue ne rimait à rien avec elle quand elle était comme ça.

Un bayement vint briser le silence de cette pièce froide et sombre. Ca y était, pensa-t-il. Ca y était vraiment. Il allait devenir « célèbre » et enfin faire ce pour quoi il était sur Terre. Même si Al n’avait jamais été croyant en une quelconque religion, il avait toujours apprécié l’idée que chacun pouvait être né avec quelque chose à faire ; libre à chacun après de suivre ce chemin ou d’en choisir un autre. Lui avait décidé d’accepter le sien et il était sûr de ne rien regretter, même quand elle partirait et que son nom serait traîné dans la boue.

C’était trop important. C’était…

TOC TOC.

Al fronça les sourcils : il n’attendait personne et personne ne savait qu’il était ici. Prudemment, sentant la nervosité prendre le contrôle de ses muscles, il s’approcha de la porte et déglutit difficilement. Etaient-ils déjà informés de ce qu’il prévoyait ? Savaient-ils tout avant même qu’il ne publie ? Il avait toujours couvert ses traces et n’en avait parlé à personne, mais… mais ils n’auraient pas été aussi hauts s’ils n’avaient des ressources qui lui étaient inconnues.
La peur prit place solidement dans son cœur alors que les secondes, tendues, s’écoulaient. La main sur la poignée, il s’apprêtait à l’ouvrir malgré sa terreur quand une voix connue vint le rassurer et lui faire ouvrir avec soulagement la porte de son domaine.

« Al… c’est moi. Art. Ouvre-moi, je sais que tu es là.
- Qu’est-ce que tu fais là ?
- Bonjour, quand même. Je peux entrer ?
- Je… »

Al hésitait. Il avait ouvert par réflexe à Art parce qu’il le connaissait et l’appréciait, mais… mais il n’était pas sensé savoir qu’il était ici. Il ne l’avait plus vu depuis deux semaines, comme les autres, et sa présence ici était illogique.
Art était un collègue au journal, qui était arrivé deux ans avant lui et se cantonnait à un rôle d’assistant du rédacteur en chef. Il était très rare qu’il écrive lui-même des articles, préférant apparemment gérer les relations humaines et l’aspect administratif de la rédaction. Le rédac’ chef étant d’un naturel fougueux et adorant prendre la plume, Art, avec son calme et sa gentillesse qui ne disparaissaient jamais, était le parfait complément pour leur patron et surtout la clé de voûte du journal.
Pour autant, tout le monde ne l’appréciait pas car il pouvait être dur au niveau de la véracité des faits et de la fiabilité des sources, préférant la rigueur de l’analyse détaillée et vérifiée aux scoops faciles et au buzz illusoire. Al n’avait cependant aucun problème avec ça et c’était pour ça qu’il avait ouvert la porte à celui qu’il pouvait voir comme un ami – même s’il se demandait maintenant s’il avait bien fait.

« Tu es là depuis deux semaines, tu es parti de chez toi et de la rédaction sans informer quelqu’un et là tu te demandes en bon journaliste paranoïaque que tu es ce que je fais ici, n’est-ce pas ? Réfléchis, Al, réfléchis. Si je suis ici, c’est parce que j’ai fait mon boulot : j’ai enquêté. J’ai appelé chez toi, j’ai compris que tu avais voulu finir ton enquête tout seul et sans mettre les autres en danger. J’ai donc téléphoné à chaque hôtel de la ville et essayé de découvrir où tu te cachais, même si je devais faire ça en dehors des horaires de bureau et si je devais être discret. Je suppose que si tu t’es enfermé ici, c’est que tu crains pour toi… ou au moins tes proches. Donc j’ai fait exprès de prendre mon temps pour ne pas mettre sur ta piste ceux que tu crains.
- Je… »

Wow. Al était impressionné. Il était habitué à de tels discours de la part d’Art, mais jamais il n’aurait imaginé en être la victime. Il l’avait déjà vu détailler entièrement l’historique des difficultés de l’enquête d’un journaliste grâce à ses notes de frais sans même avoir évoqué avec lui les pots de vin qu’il avait dû verser. Le rédac’ chef adjoint était un merveilleux enquêteur, un journaliste hors pair qui préférait l’aspect administratif à l’aventure que lui voulait vivre à ses débuts. Il n’avait jamais su le pourquoi de ce revirement mais apparemment quelque chose de sale lui était arrivé en Irak, lors de la deuxième Guerre du Golfe. Il n’en avait jamais parlé avec lui mais n’y tenait pas vraiment.

« Je peux entrer ?
- Oui… oui, bien sûr. »

Art pénétra dans la petite chambre d’hôtel et déposa son imperméable sur la table, sans même regarder le PC portable à quelques centimètres à peine du vêtement. Il alla s’asseoir dans le fauteuil en face de la fenêtre, craquant ses phalanges comme chaque fois qu’il devait évoquer un sujet difficile avec un collègue. Al prit la chaise de la table et la posta devant lui, dos à la vitre. Dehors, la pluie tombait fortement et tous les habits d’Art étaient trempés. Celui-ci semblait se réchauffer dans la chambre, même s’il n’avait jamais payé le chauffage.

« Comment… comment tu sais pour mon enquête ?
- Réfléchis, Al. Tu disparais sans rien dire après avoir mis en ordre tes articles, laissé des notes pour gérer tes indicateurs et supprimé les dossiers récents de ton ordinateur. Même l’analyste informatique ne les retrouve pas. En plus, tu as rangé ton bureau : c’était peut-être le détail de trop, d’ailleurs. Dans une telle situation, soit tu voulais te suicider, mais ça ne m’a pas paru crédible, soit tu étais sur quelque chose de trop gros pour en parler ouvertement. Je suis journaliste aussi et je l’ai été avant toi.
- C’est pas à un vieux singe qu’on apprend à faire des grimaces, c’est ça ?
- Premièrement, je suis peut-être poilu mais pas au point d’être un primate. Et deuxièmement… je ne suis pas vieux ! »

Les deux hommes sourirent franchement et Al se sentit un peu mieux. Il était exténué et la peur gardait forte la pression en lui, mais la présence d’Art lui faisait du bien. Il croyait en ses explications car elles paraissaient crédibles matériellement et humainement parlant : seul lui au journal en aurait eu assez à faire de lui pour se démener autant pour le trouver, et seul lui en aurait les capacités.

« Bon… soyons sérieux. Qu’est-ce que tu fais, Al ? Sur quoi tu es ? Et ne me sors pas le couplet du journaliste infiltré ou qui ne veut pas mettre en danger ses proches… j’ai fait ça avant toi. Si tu n’as rien dis à la rédaction, c’est que tu ne veux pas qu’on le publie. Soit. Ca m’ennuie si c’est quelque chose d’intéressant mais ce n’est pas en tant que rédacteur en chef adjoint que je suis ici, mais en tant qu’ami. Je m’inquiète de te savoir ici seul à plancher sur ton ordinateur et à te mettre en danger.
Qu’est-ce qui a justifié ces mystères, Al ? Qu’est-ce qui t’a poussé à te couper du monde ? »

Al soupira. Il ne pensait pas que la conversation prendrait ce chemin aussi rapidement même s’il n’en avait jamais douté. Pouvait-il faire vraiment confiance à Art ? Comment pouvait-il lui refuser des explications alors que ce dernier avait tant fait pour le retrouver et s’inquiétait pour lui ? Y avait-il encore un danger suffisant pour s’en tenir au mystère ? Il avait fonctionné en secret pendant deux ans et normalement tout était terminé, maintenant. Même s’il lui arrivait quelque chose, il avait mis en place un dispositif pour qu’un cabinet d’avocat londonien reçoive les informations sauvegardées la veille et les fasse publier.
Normalement, son enquête ne risquait rien s’il prenait le risque d’en parler. Et en dehors du fait qu’il faisait bien confiance à Art, il se rendait compte qu’il avait besoin de… parler. De se libérer du poids de cette enquête qui lui avait fait perdre tant de choses et allait lui en faire perdre encore plus. Le poids du silence, du secret était trop lourd pour le supporter alors que tout était fini.

« Je… j’ai trouvé il y a deux ans un document qui m’a intrigué. Tu te rappelles mon reportage sur la compagnie pétrolière qui avait finalement décidé de ne pas s’implanter près des cotes parce que ses analyses montraient que ça en valait pas la peine ?
- Oui. Après six mois, une autre était apparue et avait trouvé un puits souterrain important à quelques kilomètres des plages. La première compagnie avait été humiliée, tu avais écrit un très bon papier dessus.
- Merci. Mais en fait j’avais trouvé un document dans ma première enquête qui indiquait que la première compagnie avait reçu des analyses d’un consortium scientifique que je ne connaissais pas et qui m’avait marqué par son nom : Embrace Change.
- Joli.
- Oui. Mais en fait ce qui m’a intrigué dans l’arrivée de la deuxième compagnie, c’est que les analyses étaient totalement contraires… apparemment, en cherchant un peu, n’importe qui aurait pu découvrir l’existence de ce puits, mais pourquoi Embrace Change ne l’avait pas indiqué ? J’ai creusé un peu plus et j’ai découvert que le deuxième groupe de scientifiques, mené par un certain Schneider, avait été fondé par Anton Laboussa.
- Et ? Je ne connais personne, là.
- Anton Laboussa a un fils, qui a été à l’université avec Bernd Holle. Le fondateur et directeur d’Embrace Change.
- Et tu y vois un lien ? C’est un peu léger.
- C’est vrai, c’est pour ça que j’ai continué à chercher. En fait, Laboussa à revendu son groupe de scientifiques à Schneider mais il a fait ça pour des dizaines d’entreprises et de groupes de ce genre. La majorité des études scientifiques actuelles ont un lien, proche ou éloigné, avec lui ou une de ses sociétés. Il est à la tête depuis des dizaines d’années d’un réseau d’influence extraordinaire au niveau scientifique.
- Oui… mais ce n’est pas nouveau. Les scandales sur les réseaux de laboratoires et leurs comptes occultes sont connus du public.
- C’est vrai, mais j’ai découvert aussi que Laboussa n’était qu’un maillon de la chaîne. Il reverse chaque année des millions d’euros à différentes associations, différents organismes autour du monde pour abaisser ses impôts. Jusque-là, pas de souci. Mais je me suis rendu compte en épluchant les comptes et les feuilles d’imposition que la majorité de ses donations étaient faites à des associations factices, qui reversent après cet argent à une structure mère. Par un jeu de papiers et de faux semblants, Laboussa donne en fait chaque année des millions à une seule structure, basée à l’étranger.
- Qu’est-ce que c’est ?
- Un parti politique. Un parti politique au pouvoir à l’étranger.
- Oh…
- Oui ! Mais c’est pas tout. Ce parti a une vitrine publique mais la majorité de ses cadres proviennent de la sphère privée et ont fondé des entreprises importantes. Certes, ils les gèrent plus maintenant mais… ils ont encore des parts dedans. Et ceux qui s’en occupent sont des hommes de confiance.
- Quoi comme entreprises ?
- Chimie, pétrochimie, compagnies pétrolières, consortiums, sociétés commerciales, etc. A partir de là, j’ai commencé à vérifier les liens entre les structures de Laboussa et ces entreprises et… et bien sûr j’ai trouvé.
- Quoi ?
- Laboussa a créé un réseau qui lui ramène de l’argent dont il dépense une moitié pour financer un parti politique. Les cadres de ce parti donnent du travail aux structures de Laboussa en les engageant sur leurs actions, et en retour Laboussa se débrouille pour que les contrats tombent toujours du côté des cadres du parti.
- Mais… mais c’est à l’étranger, tout ça.
- Oui ! Mais pas que ! Le pays est apparemment rongé par les actions de ces gens et ils s’en prennent à toute l’Europe et l’Amérique du Nord ! Même nous, nous sommes touchés alors que ce parti n’existe pas chez nous ! Mais nos ressources naturelles et la faiblesse de nos institutions leur permettent de s’étendre ici aussi.
- Oh. »

Art l’avait regardé dans les yeux durant toute leur conversation. Il n’avait pas bougé, il n’avait pas exprimé sa surprise comme chaque fois qu’un journaliste lui faisait part de ses théories. S’il était bien venu en ami, c’était en tant que professionnel qu’il réfléchissait maintenant.

« Tu as des preuves ?
- Oui : je suis entré en contact avec des fonctionnaires et des agents un peu partout. Je suis heureusement tombé sur es gens avec une conscience ou parfois un peu bêtes qui ont accepté de coopérer, de photocopier quelques documents et de tout oublier. J’ai même des photos de Laboussa et de membres du parti à des orgies complètes avec des mineures : un paparazzi me les a vendues en pensant que ça m’intéresserait.
- Rien de tout ça ne sera recevable devant un tribunal.
- Je sais bien. C’est pas mon objectif.
- Qu’est-ce que tu veux alors ?
- Dire la vérité, la faire éclater. Que les gens sachent et prennent conscience.
- Ça va te coûter énormément. Tu vas tout perdre pour… quoi ? Une semaine de gloire ?
- Non. La certitude d’avoir fait une bonne chose. De ne pas m’être couché devant les puissants qui ne devraient pas l’être.
- Tu es idéaliste.
- J’en suis fier. »

Art soupira et baissa pour la première fois les yeux. Il se massa la mâchoire comme il le faisait quand il était préoccupé par quelque chose. De longues secondes s’écoulèrent alors qu’Al se sentait plus léger d’avoir enfin tout révélé à quelqu’un. Maintenant, il allait pouvoir encaisser tout ça et il était sûr qu’Art ferait ce qu’il pourrait pour l’aider. C’était quelqu’un de bien.
Après sa longue réflexion, son ami releva des yeux las et lui offrit un sourire fatigué.

« Je te félicite, Al. Jamais je n’aurais réussi quelque chose d’aussi impressionnant.
- Arrête… t’as même pas encore lu l’enquête.
- Ça viendra mais je te fais confiance. L’exposé que tu viens de m’en faire me glace le sang mais je suis heureux d’avoir été le premier à pouvoir te serrer la main. »

Les deux hommes échangèrent une poignée virile alors qu’Art continuait à parler.

« Je… je ne pense pas que j’aurais le même courage que toi. Es-tu vraiment sûr de ne pas vouloir reculer ? Tu as bien pensé à tout ce que tu allais subir et devoir sacrifier ?
- Je… oui. J’y ai beaucoup pensé et je suis sûr de moi. Je veux pas pouvoir me dire que j’aurais pu faire quelque chose de bien et que je me suis contenté de vivoter. Même si ça veut dire tout perdre, au moins je pourrais être fier de moi.
- Bien… je te connais, je sais que je ne pourrais pas te faire revenir en arrière. Je… je suis bien le premier à qui tu en parles, c’est ça ?
- Et oui ! Tu as tout en avant-première !
- Bien. »

Al arborait un grand sourire. C’était comme si la fatigue s’estompait au fil de leur discussion, comme si le contact humain et amical le faisait revenir au monde des vivants.

« Tu sais… tout ça m’a l’air vraiment impressionnant, mais… j’ai peur d’une chose. As-tu pensé que ce parti et ces gens-là puissent avoir des agents de renseignement chez nous ? Chez nous ? Comment comptes-tu publier tout ça sans être censuré ou arrêté ?
- J’y ai réfléchi : je vais tout mettre sur Internet et solidifier au maximum les systèmes de sécurité. Ça devrait tenir quelques jours.
- Je vois. Mais… tu ne crains pas qu’il y ait un agent de renseignement sur la Toile ? Ou bien un de tes indicateurs ?
- Non, ils sont cleans. Et je pense pas que ce parti se soit un jour douté de quelque chose à mon égard… je pense que je suis passé sous le radar. Jusqu’à maintenant.
- Je vois. Ça m’étonne, parce qu’en général ses pratiques sont de tout prévoir et de placer des agents dormants dans différentes structures : universités, ministères, organisations territoriales, police, etc. Même dans la presse, il y en a.
- Euh… ah bon ? Mais comment tu sais ça ? Tu sais même pas de quel parti je parle !
- Ah bon ? »

Un sourire glacial apparut sur le visage d’Art alors qu’Al se sentit commencer à geler face à cet homme dont le comportement venait de subtilement changer, passant de l’état passif à quelque chose de plus actif… et terrifiant.

« Je sais ça parce que c’est mon boulot, Al. C’est mon boulot d’être informé de tout. Et de faire en sorte que les enfants curieux ne se mêlent pas des jeux d’adulte. »

Calmement, Art se leva et sortit de ses poches une paire de gants. Il se dirigea calmement en sifflotant vers l’ordinateur portable, sans jamais jeter un œil sur le corps sans vie d’Al, touché en plein cœur avant la dernière tirade par une balle tirée de l’immeuble d’en face par un sniper qui dévalait déjà les escaliers.
Deux jours plus tard, le cabinet d’avocat londonien, qui avait reçu deux semaines plus tôt une visite courtoise d’un homme politique local, publierait bien les informations délivrées par Al sur Internet et son ancienne compagne toucherait beaucoup pour les droits qu’il lui avait laissés par un montage financier.
Pour autant, elle ne comprendrait jamais pourquoi cet homme qu’elle aimait, ce journaliste apparemment si strict et sérieux avait passé autant de temps et s’était suicidé pour publier des photographies d’orgies d’hommes politiques secondaires d’un pays étranger. Ça n’avait aucun sens – tout ça n’en aurait que dans le monde des « adultes », celui où personne ne voulait aller mais où tout le monde se retrouvait malheureusement.
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Vieux 20/08/2010, 22h15
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Salut tout le monde. Un nouveau texte à vous présenter, que j'espère meilleur que le précédent. A noter qu'il est lui aussi sur le blog.

La créature

20 août 2010


«*Tu es obligé d'y aller ?
Ne rends pas les choses difficiles aujourd'hui.
Allez... reste encore un peu...
Je ne peux pas.
Tu ne veux pas, surtout.
C'est mon boulot, Enora. Je n'ai pas le choix.
Pff...*»

Gabriel se leva, craqua sa nuque et soupira. Sa femme se retourna et s'emmitouffla dans les draps, énervée, et il savait que les jours à venir allaient être difficiles. Qu'à cela ne tienne... ça passerait, comme toujours. Elle n'aimait pas ce qu'il faisait, elle ne comprenait pas pourquoi il le faisait mais il devait le faire. Ils avaient besoin de ce salaire, de cette situation. Elle profitait bien de son argent... elle devrait pouvoir être plus conciliante, quand même.

Le passage sous la douche le ramena peu à peu à la conscience, mais son dos le faisait toujours souffrir. Ça faisait des années qu'il devait aller se faire manipuler par un professionnel, mais ça lui ferait prendre des semaines de congés, ce qu'il ne pouvait s'accorder. Pas de vacances, pas de repos : c'étaient les termes de son contrat. En échange, un logement et un véhicule de fonction, une imposante rémunération et l'assurance d'avoir les meilleures études pour ses enfants à venir.
Il donna immédiatement son accord, mais Gabriel s'était rapidement rendu compte que ses obligations allaient plus loin encore : pas de question, pas de curiosité mal placée... pas de conscience.

Bien sûr, Enora ne saurait jamais ce qu'il faisait vraiment, mais elle n'était pas stupide : c'était elle qui lavait les traces de sang sur ses chemises, c'était elle qui lui indiquait quels produits utiliser pour supprimer les bouts de peau sous ses ongles. Elle était bien consciente qu'il faisait du mal à des gens... mais elle ne disait rien.

Elle voulait profiter encore de ses privilèges et surtout elle devait avoir peur. De le perdre. Ou de lui. Mais où était la différence, il n'en avait aucune idée et n'était pas sûr d'y voir un intérêt.

Le séchage et l'habillement vite expédiés, de même que le petit-déjeuner. Une tape sur les crânes de ses deux chats acheva son petit rituel du matin avant qu'il n'entre dans sa voiture. Comme toujours, Gabriel s'accordait une pause de deux minutes trente secondes précisés. Là, il expirait et inspirait lourdement de multiples fois, les yeux fermés et les doigts accrochés férocement au volant.
Il avait besoin de ça pour faire la coupure entre sa vie privée et sa vie professionnelle. Il avait besoin de se mettre dans un état second pour faire son boulot. Ça avait été trop dur, au début, de rester lui-même là-bas. Maintenant, tout était rôdé – et c'était un peu mieux ainsi.

Le parcours ne dura pas plus longtemps que d'habitude. Montrer son badge à l'entrée, se garer, monter les escaliers, montrer son badge, prendre l'ascenseur, montrer son badge, passer à l'examen oculaire et tactile étaient toutes les étapes nécessaires pour arriver enfin à son lieu de travail du jour. A la cage.

Ça faisait des années que la vue de la «*créature*» derrière les barreaux, la plaque de plexiglas et les barbelés électrifiés ne le répugnait plus. Elle était là depuis plus longtemps que Gabriel et il ne connaissait personne dans le complexe qui l'avait vue arriver. Apparemment, elle avait toujours été là – et le serait toujours s'il faisait bien son travail.

La «*créature*» était coincée dans un long tube rempli de liquides jaunâtres étranges : munie d'un masque à oxygène, elle pouvait respirer mais une demi-douzaine de tubes aspirant son sang dans chaque bras et chaque jambe l'empêchaient de bouger. Plongée dans un état catatonique, elle n'avait jamais bougée même si tout le monde le craignait. Gabriel n'avait aucune idée de sa dangerosité mais il était suffisamment bien payé pour bien faire son boulot sans poser de question.

Il s'assit sur sa chaise confortable, tapa ses deux codes secrets sur l'ordinateur et attendit que tout s'allume. Aujourd'hui, il devait vérifier les constantes de la «*créature*» et que toute la technique fonctionnait bien. Demain, il devrait s'occuper de la gestion des litres de sang qui étaient anormalement nombreux. C'était ça, le grand mystère : comment cette «*chose*» faisait pour produire autant de sang sans mourir. Chaque jour, c'étaient des dizaines de litres qui étaient constitués dans ses veines et extraient par les tubes.
Avec, les employeurs de Gabriel se faisaient une plus-value pour une moitié en les revendant à des cliniques clandestines et pour l'autre en les donnant aux centres locaux et nationaux de dons du sang, à intervalles réguliers et en faibles quantités pour éviter d'attirer l'attention.

Bien sûr, il avait d'autres missions – celles qui étaient plus «*voyantes*» pour Enora. S'occuper des imbéciles qui enquêtaient sur eux, sur la «*créature*». Mais aussi gérer les affaires de ses patrons, faire disparaître les corps ou tabasser les témoins gênants. Gabriel était loin d'être quelqu'un d'important dans la hiérarchie mais ses patrons voulaient que leurs employés aient des occupations diversifiées. Une manière de les empêcher de s'ennuyer et surtout d'avoir sur chacun des pièces compromettantes à faire valoir si l'un d'entre eux se redécouvrait une conscience.

Comme d'habitude, Gabriel se leva et s'approcha du grand tube où dormait la «*chose*». Il avait une routine qui s'exerçait chaque fois qu'il venait ici et consistait à vérifier que la machinerie était bien fixée et que les tubes fixés aux membres de la «*créature*» débouchaient bien dans des grandes poches pour contenir le sang.
Et comme d'habitude, Gabriel appelait Enora quand il avait tout vérifié. Il se mettait dans un coin de la salle, près des poches de sang, où il savait qu'il y avait un angle mort pour les caméras. Il l'appelait et chuchotait. Elle se levait à peu près au même moment, ils discutaient quelques instants avant qu'elle vaque à ses occupations et il était heureux. Même s'il voulait faire une cassure entre le privé et le boulot, il avait besoin de se rappeler dans une telle atmosphère que lui avait quelque chose qui l'attendait, le soir. Voir la «*chose*» dans un tel état, ça le remuait. Entendre la voix de sa femme le rassurait.

Il lui restait encore beaucoup à vérifier avant de l'appeler, mais cette fois-ci le besoin fut plus fort encore. La réaction d'Enora ce matin-là, sa fatigue mentale de tout lui cacher, sa soif de vacances contrariée... ça devenait difficile pour lui de tenir. La coupure qu'il s'imposait était de moins en moins franche et il avait l'impression de trop penser à sa famille au boulot et de trop penser à la «*créature*» quand il était avec les siens.

Gabriel savait qu'il n'était plus dans son état normal. Il avait besoin de réconfort, de chaleur humaine. Son regard se posa autour de lui et il ne découvrit que froideur, mécanique et inhumanité ; il ne se sentait pas à l'aise, il ressentait même un monstrueux vide dans son cœur. Il prit son téléphone et composa rapidement celui de la maison.
Les tonalités se succédèrent jusqu'à ce qu'il entende enfin sa voix. Un petit sourire apparut sur son visage, le premier depuis son départ.

«*Salut.
Hum.
Je... je t'appelle plus tôt. J'avais envie d'entendre ta voix.
Okay.
Ça va ?
Ouais.
T'es sûre ? T'as l'air... différente.
Différente ?
Oui. Pas comme d'habitude.
Et t'aimes tes habitudes, hein ?
Quoi ?
Je dis que t'aimes les habitudes.
Je... oui. Ça me plaît, tu le sais.
Ouais.
Comme tout le monde.
Nan.
Quoi ?
Tout le monde aime pas les habitudes, Gabriel. Beaucoup aiment changer, faire des choses un peu folles. Les surprises. Beaucoup aiment les surprises, tu sais. Tu sais encore ce que ça veut dire ?
Je comprends pas.
Y a jamais de surprise entre nous. Jamais de moments où tu me surprends, où j'ai droit à quelque chose de neuf. On couche ensemble les mêmes jours de chaque semaine, dans les mêmes positions à chaque fois. Même tes orgasmes sont habituels ! On va aux mêmes restos, aux mêmes endroits, avec les mêmes gens, à parler de la même chose...
Je...
Tu veux pas parfois changer un peu les choses ? Par exemple aller en retard à ton boulot pour passer du temps avec moi ?
C'est à cause de ce matin que t'es comme ça ?
C'est à cause de chaque matin, Gabriel.*»

Et elle raccrocha. Il essaya de la rappeler mais elle devait avoir décroché le téléphone : ça sonnait dans le vide. Son portable n'était pas allumé et il n'avait aucun moyen de la joindre.
Aucun. Moyen. Alors qu'elle venait de lui débiter tout ça. Au boulot. Elle savait qu'il devait être bien là-bas pour être bien vu et continuer à ramener le salaire. Le salaire qu'elle utilisait pour ses conneries. Et voilà qu'elle l'accusait de ne pas s'occuper assez d'elle. Encore.
Ne comprendrait-elle donc jamais ? Ne grandirait-elle pas ?

Il en avait assez, il avait envie de crier, de s'énerver mais il ne le pouvait pas. Il était au boulot : il devait encaisser. Encore.
Sauf que cette fois-ci, la colère était trop grande. Gabriel se permit de frapper du poing sur la table devant lui. Juste un coup, pour se libérer un peu. Juste un, pour une fois. Pour changer les habitudes, comme Enora le voulait.

Cependant, alors qu'il sentait l'acier froid molester sa chair violemment appuyée dessus, une des poches de sang reliées à la «*chose*» par un tube fut déséquilibrée par le coup. Tombant vers la table, cette poche tira logiquement sur le tube qui lui amenait le sang si important pour les patrons de Gabriel. Or, ce tube n'avait pas été conçu pour être plus long que prévu : rien ne devait normalement le déranger ou le toucher.
Ce tube, sous cette pression subite et rapide, fut donc détaché de la poche et du sang se mit à couler sur la table. Juste devant Gabriel.

«*Oh...*»

Terrifié, il se jeta immédiatement sur le tube et le remit dans la poche de sang. Seuls quelques millilitres de sang s'étaient retrouvés sur la table, mais il savait que ses patrons ne le supporteraient pas. Il prit rapidement un mouchoir dans sa poche et absorba le sang de la table, puis le rangea dans sa poche.

Seules quelques secondes étaient passées depuis son coup et la fin de l'incident. L'angle mort comprenait aussi ce bout de la table : personne n'avait pu le voir. Tout n'avait duré que quelques instants, et il avait géré.
Tout était terminé. Pas de problème, pas de crise. Mais Gabriel savait qu'il n'était pas passé loin et qu'il devait se reprendre. Il ferma les yeux, inspira et expira lourdement. La coupure : il devait retrouver la coupure et la maintenir. Plus longtemps encore qu'auparavant. Bien plus longtemps.


Une semaine était passée.
Gabriel dormait maintenant sur le canapé. Enora avait refusé de lui adresser la parole après qu'il ait mis en avant sa dépendance vis à vis de son argent à lui. Il dormait loin d'elle et essayait de faire de son mieux au boulot pour éviter de perdre l'autre pôle de sa vie. Il se retrouvait maintenant à nouveau dans la salle de la «*créature*», après avoir pu vidé sa colère sur quelques imbéciles lors de ses autres journées de travail et ses autres fonctions.

Cependant, en regardant cette «*chose*», Gabriel savait que toute sa frustration et ses inquiétudes n'avaient pas disparu. Il était toujours terrifié à l'idée que quelqu'un sache ce qu'il s'était passé une semaine auparavant. Ses collègues et ses patrons n'avaient rien dit mais... mais il était persuadé que ça se saurait. Tout se savait toujours, ici.
Tôt ou tard, il allait payer le prix de sa faute. Le prix de cette inutile réaction humaine durant son travail.

Il fut stoppé dans ses réflexions par le vibreur de son téléphone. Immédiatement, il alla vers l'angle mort et regarda ; c'était elle. Enora l'appelait. Enfin.
Elle devait avoir compris son erreur et voulait retrouver leurs petites habitudes. Elle voulait lui faire plaisir. Elle voulait partager un moment avec lui. Avec un énorme sourire, Gabriel plaça l'engin à son oreille.

«*Chérie ? Oh, ça fait du bien que tu m'appelles, je voulais m'excu...
Gabriel...*»

Sa voix... sa voix n'était pas normale. Faible, ravagée par les larmes. Elle... quelque chose était arrivé. Quelque chose de terrible.

«*Enora, qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce qu'il se passe ? Tu vas bien ? Dis-m...
Il... il était venu pour toi... mais t'étais déjà parti...
Quoi ? Qui ? De quoi tu parles ?
Il... il était si rapide... si... oh mon dieu, Gabriel... ma jambe...
Mais de quoi tu parles ? Quelle jambe ?
Il... il a dévoré ma jambe...
…quoi ?
C'est toi qu'il cherchait... le... le mouchoir...*»

Gabriel ne comprenait rien et Enora ne lui apprendrait pas grand-chose de plus : elle était en état de choc et serait incapable de formuler des idées précises dans les heures à venir. Pour autant, il y avait quelque chose qui l'avait mis dans cet état et il craignait que certaines de ses paroles ne soient vraies.
Il allait lui dire de se calmer et décider de venir la voir quand la porte de la pièce fut propulsée au milieu de la salle, emmenant au passage sa chaise et la moitié des équipements sur son bureau.

Alors qu'il entendait les pleurs de sa femme au téléphone, Gabriel fixait l'entrée béante. Aucune fumée, donc aucune explosion. Aucun homme armé se positionnant à l'intérieur, donc aucune attaque des ennemis de ses patrons. Alors quoi ? Qui avait pu bien faire ça ?

«*Pas qui. Quoi.*»

Une voix traînante venait de prononcer ces quelques mots, précédant l'entrée d'un être... étrange. Grand, brun, squelettique, son visage était extrêmement blanc et sa silhouette était enveloppée dans un grand manteau sombre. De très longs ongles continuaient ses doigts ossus et étaient maculés de sang. D'ailleurs, sa bouche aussi était maculée de sang. Et son sourire révélait de grandes canines.
Gabriel lâcha son téléphone, délaissant sa femme en pleurs. Il avait d'autres priorités.

«*Vous... vous...
Je suis bien ce que tu penses, Gabriel. Je suis un vampire. Et oui, je lis dans tes pensées. Tu n'as pas assez bien parcouru Bram Stoker étant jeune : tout ce qu'il disait était vrai... ou presque. Le soleil ne nous est pas mortel, mais nous devons quand même nous protéger de lui. Cela n'empêche que je peux marcher dans la rue et venir te voir. Après avoir vu ta femme.
Vous... c'est vous qui...
Oui, Gabriel : c'est moi qui l'ai attaquée. Je te félicite pour ton choix, d'ailleurs : malgré son âge, elle était encore très bien conservée. Elle doit faire du sport, non ? Oui, de la course, c'est bien. Ça a rendu sa jambe très ferme. Exquis.*»

Gabriel ne comprenait rien et était tétanisé : il n'arrivait pas à bouger. Il avait l'impression que tout son univers avait basculé dans la folie.

«*C'est exact : tu ne contrôles plus rien et tu ne le supportes pas, pas vrai ? Tu aimes les habitudes, elles te rassurent. Tu as besoin de te sentir en confiance, entouré d'éléments que tu maîtrises. Tu n'es pas un homme très entreprenant, tu détestes les surprises. Je peux comprendre cela... mais je trouve ça terriblement ennuyeux.
Pour... pourquoi...
Tu as peur, tu n'arrives même plus à parler correctement. Tu n'oses pas croire à mon existence alors que tout indique que je suis bien réel et que j'ai dévoré un membre de ta femme. Tu penses que je t'en veux personnellement et tu recherches pourquoi ? Tu es dans l'erreur. Tu n'es pas ma cible : elle est derrière toi.*»

Il se retourna et vit la «*créature*», toujours endormie.

«*Arlak et moi avons une longue histoire commune. Je n'ai pas besoin de t'expliquer en quoi sa spécificité le rend indispensable à mes yeux, non ? Pendant des décennies, car il vieillit très lentement, il a été mon repas éternel, un cadeau miraculeux. Malheureusement, une erreur de ma part lui a permis de s'échapper. Cela fait un siècle que je le poursuis, vois-tu. Du fait de sa spécificité, je suis certain qu'il vivra encore une dizaine de siècles, et je n'ai donc jamais perdu espoir. Je pense que c'est dû au fait que son sang se renouvelle constamment, mais... je ne suis pas scientifique. Et ça ne m'intéresse pas : seul compte le résultat.
Et le résultat, c'était que j'avais grâce à lui des repas sûrs et de qualité à jamais. Je l'avais perdu... mais je l'ai retrouvé. Grâce à toi.*»

Gabriel colla son temps contre le tube. De grosses gouttes de sueur coulaient le long de son dos. Il était terrorisé.

«*Oui, Gabriel : tout ça est de ta faute. Au fond, tu as raison de chérir tes habitudes : elles évitent de se mettre en danger. Elles sont sans surprise, bien sûr, mais... elles sont sans danger. Malheureusement, il est arrivé quelque chose de différent la semaine dernière, c'est ça ? Un accident, un moment d'inattention... je n'en sais rien, je m'en fiche remarque. Mais tu as fait couler le sang de ce cher Arlak. Oh, tu l'as vite essuyé avec ton mouchoir, mais... tu as des soucis avec ta femme, n'est-ce pas ? Disputes sur disputes, obligation de dormir sur le canapé... tu as oublié le mouchoir, tout simplement. Or, il était toujours à l'air libre. M'attirant... m'appelant.*»

Un sourire carnassier apparut sur le visage du monstre. Gabriel se mit à trembler.

«*Bram a voulu informer les gens de son époque mais nous ne lui avons pas permis d'en dire autant qu'il en savait sur nous. Nous l'avons connu, il a été fasciné par nous et il a voulu informer le monde... par l'intermédiaire d'un livre, d'une fiction. Ça nous a beaucoup amusé, mais nous lui avons interdit d'en dire de trop sur ce que nous pouvons faire. Nos sens sont beaucoup plus développés que tu le penses, Gabriel... et le sang d'Arlak a une odeur bien caractéristique, que je connais parfaitement pour l'avoir dégusté pendant des décennies.
J'étais loin, quand j'ai senti l'odeur... mais je suis venu aussi vite que possible. J'ai retrouvé ta maison, j'ai goûté ta femme... et elle m'a dit où tu travaillais. Le reste, tu l'imagines : tu vas mourir, je vais récupérer Arlak et... oh, mais qu'est-ce que c'est ?*»

La bête se retourna pour faire face aux collègues de Gabriel, surarmés et déjà en position de combat. Les patrons avaient mis au point des systèmes électroniques empêchant tout bruit lors des déplacements avec en plus des costumes qui modifient leurs couleurs pour se fondre dans le décor. Ils ouvrirent le feu et le monstre fut propulsé en arrière sous le choc, le déluge de feu ne s'arrêtant pas avant de longues secondes.

Cependant, alors que le cœur de Gabriel reprenait peu à peu son rythme normal en se disant que tout était terminé, le vampire puisqu'il fallait le nommer ainsi se releva et passa sa main sur sa poitrine : le manteau était couvert de trous mais son corps blanchâtre ne comportait aucune trace ! Un sourire bestial apparut sur son visage avant qu'il ne fasse un saut inhumain en direction de... Gabriel !
Ses collègues n'hésitèrent pas : ils ouvrirent à nouveau le feu, en risquant de le blesser. Il se baissa et se recroquevilla au pied du grand tube. Le monstre tomba juste devant lui alors qu'il sentait le verre tomber sur lui avec le liquide à l'intérieur de la prison de «*Arlak*». Les balles avaient détruit la vitre pourtant doublée et la «*créature*» serait désormais à l'air libre.

Cependant, ce n'était pas ça qui attirait l'attention de Gabriel : c'était la rage animale du monstre qui se relevait et ne supportait plus les balles qui avaient pénétré sa chair morte. Les poings serrés, un cri guttural sortant de sa gorge, il se précipita cette fois-ci sur les hommes en arme. Le reste ne fut qu'un long massacre qui tétanisa son unique témoin : pendant cinq terribles minutes, la bête massacra méthodologiquement ses camarades.
Du sang recouvra les murs, les poitrines et les membres étaient déchiquetés. Le vampire se releva, son manteau entièrement rouge tout comme ses mains. Il se retourna pour s'occuper définitivement de Gabriel puis de sa proie, mais son visage devenu plus serein après le massacre prit l'expression de la surprise puis de la colère.

Il se précipita vers Gabriel et l'égorgea d'un coup sec, sans même le regarder. Ses yeux étaient concentrés sur le tube, et son geste fut aussi accessoire que s'il posait un objet. La vie de Gabriel quitta son enveloppe charnelle, mais il put encore entendre le cri de rage du vampire après avoir découvert qu'Arlak avait disparu. Il avait profité du massacre suivant la fusillade pour s'enfuir par une des portes dérobées de la salle.

Gabriel disparut avec un léger sourire aux lèvres : au moins son erreur servirait à ce pauvre Arlak pour qu'il puisse s'enfuir. Il avait fait au moins une bonne action... quelque chose qui marquerait l'histoire. Au moins celle d'un homme.
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mais il meurt toujours à la fin?
__________________
"l'homme qui a perdu la faculté de s'émerveiller et d'etre frappé de respect est comme s'il avait cessé de vivre" A.Einstein

Excusez mon humour de chiottes mais c'est parce que j'y mets tous les déchets de mes sentiments.
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  #208  
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Maiiiis rien n'indique qu'il est mort, là.
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  #209  
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Citation:
La vie de Gabriel quitta son enveloppe charnelle(...)Gabriel disparut avec un léger sourire aux lèvres(...)
à moins qu'il ait un pouvoir de téléportation de l'âme ou un truc du genre, disparaitre ou quitter son enveloppe charnelle, chez moi ça veut dire mourir
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"l'homme qui a perdu la faculté de s'émerveiller et d'etre frappé de respect est comme s'il avait cessé de vivre" A.Einstein

Excusez mon humour de chiottes mais c'est parce que j'y mets tous les déchets de mes sentiments.
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  #210  
Vieux 21/08/2010, 19h16
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Ben Wawe Ben Wawe est déconnecté
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Ben Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à Galactus
Ah oui mais je parlais d'Arlak, pas de Gabriel. Lui est bien mort, oui. Remarque, c'était son rôle : le drame inaugural classique.
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