Daredevil : Redemption

[Niglo]

Daredevil : Redemption
(Marvel Knights, 2005)
Par David Hine et Michael Gaydos.

Cette mini-série en 6 parties est un projet assez inhabituel, une histoire inspirée d’un fait divers réel, mais mettant en scène dans ce contexte un super-héros et son univers habituel. Le fait divers, c’est le meurtre ignoble d’un petit garçon de neuf ans dans une petite ville d’Alabama, et la chasse aux sorcières qui s’en est suivie, aboutissant à l’arrestation de trois adolescents forcément coupables puisque fans de heavy-metal et soi-disant satanistes pratiquants. Le super-héros, c’est Daredevil, et son alter-ego civil, l’avocat Matt Murdock, qui va se voir confié l’affaire.

Le fait divers qui nous est présenté ici est typique d’une partie des Etats-Unis, presque caricatural : le sud rural, une petite ville toute entière tournée vers son église, l’ignorance, la haine de la différence. Le meurtre à l’origine de cette affaire est atroce, et l’enquête menée va déterrer au fur et à mesure une réalité sordide, faite de mensonges, de violence quotidienne, d’inceste. Dans ce contexte, on ne peut évidemment que sympathiser avec les trois accusés. On peut aussi regretter que tout cela apparaisse finalement un peu trop manichéen, en tous cas du point de vue d’un lecteur français.

David Hine, dont on a déjà pu apprécier les qualités sur District X, déroule son intrigue de façon très efficace. La vérité se fait jour petit à petit, on se doute depuis le début que les trois adolescents ne sont que des boucs émissaires, la suite de l’investigation ne fait que le confirmer. Au passage le scénariste dresse quelques portraits très réussis, souvent attachants, comme la mère de l’un des accusés, épouse de l’ancien pasteur de la ville. Le cinquième épisode est entièrement consacré au procès proprement dit, là encore une réussite.

Qu’apporte la présence de Matt Murdock/Daredevil à cette histoire ? A première vue pas grand chose. Passons sur le fait qu’aucune explication n’est donnée au fait qu’on vienne jusqu’à New York chercher Murdock pour s’occuper de cette affaire. Passons sur le fait que le scénariste doive ruser pour que Murdock plaide sans avoir la certitude que son client est innocent (il prend un médicament qui fait que Murdock ne peut se fier à ses battements de cœur pour savoir s’il dit la vérité ou non). Le plus gênant dans les premiers épisodes est la présence de Daredevil à Redemption Valley, qui apparaît tout à fait incongrue. Rien ne justifie vraiment que Murdock enfile de temps à autres son collant pour mener son enquête. La présence de ce Diable symbolique au pays des grenouilles de bénitier a pour effet d’exacerber les tensions, mais au final cela nuit davantage à Murdock (et donc aux trois accusés) que cela ne le sert.

C’est dans le dernier épisode que la présence de Daredevil prend tout son sens. Il se trouve alors dans une situation telle qu’il est contraint de choisir entre l’avocat et le vigilante. J’ai toujours été étonné que cette dualité, qui constitue pourtant l’essence même du personnage, ait été aussi peu exploitée depuis quarante ans. Ici David Hine aborde la question de face et force son héros à faire un choix. Le scénariste procède avec une grande subtilité, tout en finesse, et fait oublier du coup tout ce que la présence du héros dans cette histoire peut avoir d’artificiel.

[DamSnou !]

Bravo pour ta critique ! En tous cas tu me donne envie de lire une hypothétique vf, vivement que ça sorte.

[Niglo]

Tiens, je précise aussi que le tpb est annoncé pour le 5 octobre prochain.

[Ben Wawe]

pas mieux, bravo.

[michel]

	Citation:			Posté par Niglo
	Passons sur le fait qu’aucune explication n’est donnée au fait qu’on vienne jusqu’à New York chercher Murdock pour s’occuper de cette affaire.

C'est pas la mère d'un des accusés qui a entendu parler de lui à la télé et qui a tenu à l'avoir lui comme avocat ?

[Niglo]

Si, mais ça me parait quand même très léger. L'histoire se situe 7 ans plus tôt, Murdock parait être encore un jeune avocat, pas vraiment une star du barreau. Et puis New York-Alabama, ça fait tout de même une petite trotte...

[Ben Wawe]

peut-être voulait-elle un avocat de la ville qui avait moins d'a priori sur les accusés qu'un avocat du cru qui aurait bâclé son boulot pour suivre la pression de ses amis/collègues et de l'Eglise...

[john_constantine]

Dès qu'il faut parler église t'es là

En tout cas , très bonne critique Niglo , faudra que je mette la main dessus.

[Ben Wawe]

	Citation:			Posté par john_constantine
	Dès qu'il faut parler église t'es là

infâme. 8)

[grogramane]

	Citation:			Posté par john_constantine
	Dès qu'il faut parler église t'es là

Dit celui qui porte un nom d'exorciste

[Ben Wawe]

"quand les démons arrivent sur Terre,

il les renvoie en enfer."

8)

[John Keats]

Mon dieu maintenant quand on pense John Constantine on pense exorciste. Brule en enfer Keanu Reeves!
Sinon pour ce qui est de la mini série je grossirais à peine le trait si je disais que ce qui m'a poussé à l'origine à la tenter, c'était les couvertures de Bill. Et aussi parceque j'avais bien aimé les District X de Hine. Je suis tout à fait d'accord avec Niglo, le principal écueil est tout simplement la présence de Murdock et son alter ego vigilante. Aussi bon soit le dénouement ça n'enlève jamais le gout d'artificialité de sa présence, dommage c'était vraiment sympa à part ça.

[Niglo]

Je me rends compte que je n'ai pas dit un mot du travail de Michael Gaydos, et c'est très mal de ma part

Le scénario offre quelques scènes très fortes, et Gaydos, avec ses dessins tout en ombres, accentue la force de ces passages. Je pense notamment à cette scène où un personnage détruit une preuve risquant de l'incriminer (URGHHH!!! ) où à la découverte de cette pièce où la famille venait planter un clou dans le mur pour chaque péché commis. L'intérêt de cette mini lui doit également beaucoup.

[hellshock11]

tres bonne critique ! je l'ai egalement lu et bien apprecié cette mini !