Les zombis d'août, vous les aimez au Moyen Âge.

[Thoor]

	Citation:
	2 PIECES D’ARGENT Les deux petites pièces d’argent tombent, tournoient dans le vide, rebondissent sur la table en bois, tournoient encore, percutent le sol et finissent leur course sous un bahut. Mon oncle et moi restons figés. Cela fait quatre fois que l’on replace ces maudites pièces. Elles doivent favoriser le repos de l’âme de notre patiente, Berthe, l’épouse de notre seigneur. Habituellement nous les plaçons sur les paupières closent a la fin de notre office, mais Godefroy, notre seigneur, a insisté pour qu’elle soient en place dés le début des préparatifs. Mon oncle, Jehan, fronce ses épais sourcils blancs, et tout en lissant sa longue barbiche me dit : _ Gamin,il me semble que notre patiente refuse les soins que nous lui apportons. Fait donc fondre un peu de plomb afin que, pour une fois, nous lui imposions notre volonté. » Un petit sourire en coin, je m’exécute néanmoins rapidement. Mon oncle m’enseigne la thanatopraxie, et, bien que patient, ses coups de badine peuvent vite s’avérer mordants. Alors que je maintiens la coupelle au dessus du feu, j’entends mon maître exercer son art dans mon dos. Il pioche divers ingrédients dans les pots de terres cuites qui encombrent les étagères du petit local. Une pièce sombre, malodorante, qui m’avait causé bien des cauchemars au début de mon apprentissage. Il y a peu de meuble, tout juste un bahut, un râtelier avec des outils dignes d’un boucher et bien sur la table. Une table en chêne, toute simple, placée de façon à pouvoir se mouvoir facilement autour. Au dessous, une bouche d’écoulement, sinistre grille métallique qui couvre un puit sombre d’où émane une odeur pestilentielle. Je me suis penché au dessus, une fois, pour tenter de voir ce qui pouvait s’y trouver. Je n’y ai vu qu’une obscurité impénétrable et rien d’autre. Vraiment rien de rien. Peut être …. Non rien. Mon oncle poursuit le toilettage. Le plomb ayant fondu, j’amène la coupelle au dessus du visage de la défunte. Le maître thanatopracteur remet les pièces d’argent en place, j’incline doucement le récipient et le métal coule doucement. Une odeur de poils brûlés s’élève lorsque les cils disparaissent. _ Gamin, deux coups de badine. Tu as versé trop de plomb, il va me falloir utiliser plus de maquillage et effacer les coulures. J’incline la tête en signe d’acceptation. Je suis trop nerveux. Je ne peux m’empêcher de jeter de fréquents coups d’œil aux pièces pour voir si elles restent bien en place. La préparation se termine rapidement par l’habillage. Une lourde robe de velours pourpre rehaussée d’un col en hermine blanche, vêt avantageusement notre dame. Je hèle un servant, et me voilà portant le brancard à travers les corridors du château vers la chambre de la défunte. Angoissant trajet, les couloirs familiers dont les ombres semblent trop grandes. Le claquement régulier de nos sandales sur le sol glacé, qui résonne lugubrement, et qui n’éveille aucun écho. Nous ne croisons pas âme qui vivent avant d’atteindre la chambre de Berthe. Un garde nous ouvre la porte. A l’intérieur il n’y a que quelques proches pour la veillée. Le Père Mathieu commence sa bénédiction. Sa voix monotone et grave s’harmonise parfaitement a cette soirée d’hivers. Godefroi notre seigneur reste prostré sur son siège. Les bougies se consument lentement, alourdissant l’air de leur odeur de cire fondante. La liturgie semble durée des heures. Un petit tintement se fait entendre. Dans l’épais silence qui nous enlace, ce petit bruit cristallin résonne comme un appel aux vêpres. Tout le monde se regarde, gênés, seul Godefroi ne bouge pas. Mon oncle fronce les sourcils et en me lançant un regard lourd de reproches ramasse la petite pièce d’argent qui est tombée. Berthe nous adresse depuis son lit de mort un clin d’œil morbide. Je fixe cet œil grand ouvert, vitreux. Le plomb forme de petites croûtes aux coins des paupières, apparaissant malgré le maquillage de Jehan. Ce clignement me fait peur, je le confesse. Le prêtre repend son dialogue Divin. Je continue de fixer le visage de la trépassée. Ce clin d’œil me semble de plus en plus étrange, presque salace. C’est alors que je vis l’autre paupière bouger. Forcer. Lutter un instant et malgré le scellé s’ouvre. La pièce tombe, brisant a nouveau le silence. Je regarde avec une horreur grandissante les yeux morts rouler dans leurs orbites. Le corps s’anime dans d’horribles tressautements alors que sonnent les douze coups de minuit. Chacun se précipite vers la sortie sauf trois personnes, Godefroi qui reste amorphe sur son fauteuil, moi-même paralysé par l’effroi et mon oncle. Il ne semble pas troublé par la créature. Il sort d’une de ses poches un petit flacon dont il vide le contenue sur la diablesse. Le liquide semblant être de l’eau, ne produit aucun effet. Les gestes de la créature prennent de l’amplitude ; elle se redresse. Un gémissement inhumain jaillit de l’immonde gorge. Ma peur est tel que je m’oublis. Du coin de l’œil je perçois monseigneur qui se ratatine sur lui-même, comme portant un fardeau trop lourd. « Gamin, viens là ! Tonne Jehan, ce qui me sort un peu de ma torpeur, approche le brasero » Je m’exécute en contournant largement la créature. Elle reste assise sur la table, hurlante chose qui injurie Dieu lui-même. La maître thanatopracteur m’empoigne les mains et renverse les braises sur la goule. L’horrible odeur de chair brûlée emplit la pièce. J’y prend à peine garde tant je suis choqué. La morte-vivante ne réagit pas à la douleur comme elle aurait dû. Son hurlement semble juste un peu plus strident. Un grincement se produit lorsqu’elle tourne la tête vers son mari. La bouche dessine un rictus qui se veut un sourire. Elle tend les bras et descend de son lit pour enlacer Godefroi. Accrocher au brasero comme un noyé a une branche salvatrice, je plonge le foyer dans le dos de la chose. Jehan sort de je ne sait où une épée, ou un grand couteau, et d’un mouvement ample décapite la morte. La créature bouge encore. Découpée en morceaux, les membres grouillent sur le sol. Nous ramassons les restes et les entassons dans l’épais couvre-lit. Godefroy ne bouge toujours pas. Jehan a bien tenté un sermon, apparemment, le seigneur du Bas-Michet avait tenté de sauver sa femme. Rien ne semblant l’atteindre, mon oncle me fit signe et nous retournons à notre lugubre officine. Cependant, nous passons devant la porte sans nous y arrêter. L’air tendu de Jehan me dissuade de l’interroger. Le sol s’incline et bientôt nous arrivons dans une partie du château proche de oubliettes. L’odeur de pourriture est atroce. Des choses grognent et rampent autour de nous, chassées par la lumière tremblotante de nos torches. Une alcôve vide. Nous y lançons notre fardeau grouillant. Mon oncle, marmonne quelques mots et m’éloigne de cette ignoble sépulture. En sortant de ce lieux d’horreur, je tente de me persuader que les bruits que j’entend a présent ne sont pas des bruits de mastications. Qu’il n’y a sans doute que des rats et de la vermine ici. Seigneur, je t’en supplie, que rien n’en sorte jamais.

Enfin fini, bonne lecture a tous

[Hilarion]

Et de 2!


De mon côté, j'ai trouvé la première phrase et le nom de mon personnage principale, piqué à P'titluc...

[gorlab]

une ch'tite nouvelle bien sympa que n'aurait pas renier Clarck Ashton Smith.
Juste "alourdissant l’air de leur odeur de cire fondante" cire fondue plutôt non ? bon... elle peut être fondante aussi, mais c'est pas un Kit-Kat.

[Thoor]

J'avais hésité sur cette formule......

merci pour vos lectures

[Deadpoule]

CHOUETTE ! moi qui voulais tant te relire !

[Althéa]

J'ai adoré. Plein de bonnes idées tout ça, l'idée

des deux embaumeurs

est très sympa et la conclusion est ce qu'il y a de plus réussi .
Ambiance glauque réussie

Une question,

Les embaumeurs utilisent le terme "patient" ? parceque ça m'a donné l'impression qu'elle était en vie au départ. Peut êre que je me trompe...

[grogramane]

j'aime bien l'ambiguité de la phrase:

Seigneur, je t’en supplie, que rien n’en sorte jamais.
le tout est de savoir à quel seigneur il adresse sa priere

[Diablowagner]

Bon, je m'y essaye à mon tour, ayant voté pour la période, c'est le moins que je puisse faire. Première participation, n'hésitez pas à critiquer pour me permettre de m'améliorer

	Citation:
	"Mon seigneur, mon seigneur !" La voix était encore loin, mais l'écho des voutes de la chapelle le répercutait jusqu'à la personne agenouillée devant l'autel. Cela ne le perturba pas le moins du monde, et il continua sa lente litanie, en latin. Il la conclut par un signe de la croix, et se releva. L'âge n'avait pas encore assez d'emprise sur son corps pour l'empêcher de se lever correctement, mais il sentait le poids des responsabilités sur ses épaules... Le monde était devenu si compliqué. "Mon seigneur !" Le garde venait d'entrer dans la chapelle, et il avait cessé d'hurler, se contentant de chuchoter assez fort pour attirer l'attention de son maitre. Peine perdue, l'homme n'avait pas fini. Il s'inclina pour allumer cinq bougies, et déposer une gerbe de roses, les seules qui avaient poussé cette année dans un recoin des jardins du château, près des murailles. Dire que les rosiers s'étendaient auparavant à perte de vue, depuis le donjon... Enfin, il se retourna, pris son casque sous le bras, et avança vers la sortie. Le temps n'était plus au passé, seul le présent comptait. Quand au futur... La lumière du soleil lui fit cligner des yeux, mais il s'y habitua vite, et s'intéressa enfin à ce que son serviteur avait à lui dire : "Messire, je suis désolé de vous avoir dérangé... mais un homme vous demande à l'entrée du château." Une visite... voila bien longtemps que ce n'était plus arrivé... Se pouvait-il que ce soit... "Un Vivant ?" "Oui messire, à ce qu'il semble. Il est entouré d'une petite troupe, fort mal en point. Vous.." "Je sais ce que j'ai à faire, conduis moi" Il savait probablement aussi bien que cet homme où il devait se rendre, mais il tenait à faire respecter la hiérarchie dans sa maison. C'était probablement la seule chose qui ne faisait pas craquer toutes les personnes sous ses ordres, et qui lui interdisait de craquer lui-même. Il songea avec amertume à tous ceux qu'il n'avait pu retenir ici... Ceux qui étaient parti revoir leur famille, ou qui pensaient qu'ailleurs seraient moins horrible qu'ici... Il n'en avait revu aucun. Il secoua la tête en songeant qu'autrefois, il aurait prié que Dieu les protège... Aujourd'hui... Enfin, il arriva sur le chemin de ronde, et put voir la petite troupe qui attendait devant les douves pleines. L’eau ! Voila un moyen efficace de les arrêter ! Il n'en avait encore vu aucun nager, fort heureusement... Il fronça les yeux pour observer l'oriflamme. Petit-Mesnil ! Il failli sauter de joie ! Son vassal vivait encore ! Sa joie retomba cependant bien vite. Ca ne serait pas la première fois qu'un démon se ferait passer pour une de ses connaissances pour rentrer... L'image de son frère s'imposa à nouveau, la gorge arrachée et les poumons en train d'être dévorés par la veuve d'Attigny, à qui on venait d'accorder l'asile. Dire qu’il avait du tuer à nouveau son frère après… Il serra la garde de son épée, et hurla : "Sautez ! Une corde vous sera envoyée !" Le hissage se fit sans trop mal, ses hommes étant habitués à la manœuvre. C’était la seule qui pour l'instant lui avait garanti que seuls les vivants franchissaient ces murailles. Il s'arrêta devant le seigneur de Petit-Mesnil, qui s'agenouilla devant lui. "Pardonnez-moi votre Grasce, d'avoir mis tant de temps. J'ai voulu... j'ai voulu..." Il fut pris d'un sanglot, et puis un autre, et le Duc se jeta à genoux pour l'enserrer dans son bras. Cet homme avait était le plus brave d'entre les braves, mais il ne pouvait lui en vouloir de réagir ainsi... Comment bien agir dans un monde où Dieu vous avait abandonné, et avait déclenché ce fléau. Il ne l'interrogea pas plus. Il n'avait pas voulu décevoir son vassal quand celui-ci était parti à la recherche de sa fille, emportant cinquante de ses meilleurs gardes avec lui, avec l'autre espoir de trouver d'autres survivants. Ils ne revenaient qu'à cinq. La liste des pertes ne cessait de grimper... Enfin, la crise cessa, et quand ils se relevèrent tous deux, son homme-lige avait retrouvé la dureté de ses traits. "Mon Duc, tout n'aura pas était en vain. J'ai bien retrouvé quelques survivants, qui ont pu me donner quelques nouvelles du monde. Rome a entièrement brulé il y a de cela 10 lunes, et Paris est aux mains des Sans-vie, tout comme Reims. L'armée royale a totalement été détruite il y a peu, et Son Altesse... Notre royaume n'a plus de Roy..." Il secoua la tête. Tout cela était prévisible... Rien ne pouvait les arrêter, il avait pu tester ça dans la débâcle de Reims... Le première percée du Mal en Champagne... ils venaient du royaume de Bourgogne qu'ils avaient ravagé, et étaient monté directement sur Reims. Certains avaient dit qu'ils voulaient détruire la cathédrale sacrée où l’on faisait les Roys, d'autres qu'elle était la ville où ils pourraient se nourrir en masse... L'attaque avait eu lieu pendant la foire, et l'impréparation du Comte avait couté des milliers de vie... Les flèches étaient totalement sans effet, et seules les épées, maniées d'une main experte, avait quelques chances. Mais la plupart des miliciens étaient armées de bâtons, et ils étaient de toute façon trop peu nombreux pour résister à l'assaut en nombre des Sans-Vie. Le carnage avait été total, premier d'une longue lignée... Il ferma les yeux, mais les images refusaient de s'en aller... Des flashes, d'épées maniées pour décapiter, la seule solution trouvée pour les arrêter, des relents de pourriture qui vous prenaient à la gorge, les hurlements des blessées, et les grognements des morts qui revenaient à la vie. La fuite, seule solution, et l'enfermement... Dernière vision d'un visage en décomposition qui réussit à lui mordre le bras... coup de bouclier qui arrache la moitié d'un crane, mais sans desserrer la mâchoire, et dont l'orbite à présent vide le contemple... Il rouvrit les yeux en contemplant son moignon... Seule façon d'empêcher le mal de se propager... Le passé était le passé. La perte d'un bras n'était rien face à la mort. "Le Roy ne pouvait rien pour nous depuis longtemps. Que Dieu, s'il existe encore, ait son âme..." Pauvre jeune prince, il n'aurait pas régné longtemps. Les souvenirs de son baptême, puis de son sacre lui revinrent quelques peu en mémoire, mais si lointain qu'ils auraient pu appartenir à un autre homme... Sa mère vivait encore alors, et il n'avait pas été obligé de la tuer... deux fois... Sa main valide serra son épée, et il reprit conscience avec le présent. Pas pour la première fois, il se refusa à vivre dans le passé. Mais qu'il était dur de vivre dans ce présent... "Viens mon ami, nous aurons le temps de discuter une fois que tu te seras reposé." La nuit tomba rapidement, et le repas donné fut frugal, même à la table du Duc. Plus personne ne se risquait à cultiver ou récolter les champs, et encore moins à chasser les bêtes. Il secoua la tête à ce sujet, se demandant comment ils passeraient l'hiver, une fois les douves gelées et les réserves vides... Un bruit inhabituel le fit sursauter, et le gout amer de la trahison lui emplit la bouche quand il se tourna devant son vassal. Son pont-levis était en train d'être abaissé, et il ne pouvait l'être que par les hommes rentrés aujourd'hui. Son ami s'était remis à pleurer, et il ne put entendre qu'un faible "ils tenaient ma fille..." Avec un juron, il se précipita pour observer ce qui se déroulait dans la grande cour. La pleine lune lui révéla les couleurs de Meaux, et les hurlements lui glacèrent le sang. Les Sang-Vie de ce territoire étaient les pires, surtout quand ils affrontaient ses armées... Vieille querelle qui duraient du temps des vivants, et qui se poursuivait désormais après la mort. Sa dernière ligne de défense venait de s’écrouler, et ses gardes ne tiendraient pas longtemps face à la horde qu’il voyait arriver. Il avança à petits pas jusqu'à la chapelle et s'y posta devant, épée au clair. Le dernier seigneur des Brienne quitterait la vie selon sa volonté, en protégeant les siens. Il espérait qu'au moins la mort lui apporterait un peu de réconfort...

[Hilarion]

Belle ambiance et récit captivant! Bravo.

Il faut absolument que tu écrives plus souvent!

Un polar pour le prochain défi?

De mon côté, j'ai 6 lignes... je progresse.

[grogramane]

lorsque tu ecris:

... Le passé était le passé. La perte d'un bras n'était rien face à la mort.ne serait ce pas plutot la non-mort?

[Thoor]

Excellent texte, bonne analyse du Fléau

Je pense comme Halnawulf, tu devrait écrire plus souvent

[grogramane]

j'y pense!
2 pieces d'argent: le croque mort Jehan me fait penser au Legiste du NCIS le Dr Mallard
le texte de diablowagner me fait un peu penser à l'abiance de Beowolf (le film avec Lambert)dans le chateau mais en beaucoup mieux (pardon Christophe Lambert, mais ce film est tout pourri)

[Deadpoule]

	Citation:			Posté par grogramane
	(pardon Christophe Lambert, mais ce film est tout pourri)

...

	Citation:			Posté par Christophe
	Pas de soucis, j'ai l'habitude

[Thoor]

	Citation:			Posté par grogramane
	2 pieces d'argent: le croque mort Jehan me fait penser au Legiste du NCIS le Dr Mallard

A quel niveau?

Parce que c'est bien inconsciemment alors.

[grogramane]

remplace "gamin" par "Mr Palmer" et "deux coups de badine" par "je devrais vout taper sur les doigts"

et aussi Ducky parle à ses cadavres comme s'ils étaient encore vivants...